Lovelace - ft. Karl

Un nouveau sourire se dessine sur ses lèvres, plus apaisé, plus visible. "T'as fait exactement ce que je voulais. J'ai gagné." Xiao est parcourue de petits soubresauts. Silencieusement, elle rit. Usant des dernières forces que ses muscles lui offrent pour un petit moment, elle se retourne pour profiter de la chaleur d'un Karl encore en sueur. "Je dois plus sentir si bon, là. Tu veux vraiment faire ça ?" Elle, s'en fiche bien. Elle a froid, et n'arrive pas à attraper le plaid tombé au sol sous le coup de leurs folies nocturnes. "Oh, tant pis, t'es pas propre non plus." Marmonne-t-elle en se lovant contre lui, tel un chat frileux. Petit à petit, sa respiration saccadée et ses tremblements s'apaisent, et elle ouvre à peine les yeux, le regard perdu dans le vide. "Alors, j'suis mieux ou moins bien que les nanas de Moskva ?" Elle rit, en se remémorant leur discussion au restaurant. "J'suis pas une pro, mais je suis sûre que je me défends."

Karl reste contre elle, la serrant tendrement. Après l’effort, le réconfort. Sentir son corps nu et chaud contre le sien, tout aussi dénudé et brûlant est plutôt agréable au final. La propreté n’est pas vraiment ce qui lui importe le plus présentement. De toute manière, Xia ne peut pas être sale. Il la voit toujours comme une petite poupée qui sent bon. Enfin, peut-être pas sur l’instant présent, mais son état n’altère en rien l’attirance que Karl a pour elle. C’est ainsi, le jeune homme s’en est épris et ne peut pas changer les choses si facilement.

“ Je suis content que tu aies aimé. Est-ce que j’suis le meilleur ? “

Demanda t-il très sérieusement. Xiao avait vraiment eu l’air de découvrir quelque chose de nouveau à ses yeux, le jeune homme voulait donc savoir. Et peut-être avoir une raison de plus pour qu’elle s’attache à lui. C’était peut-être un peu inespéré de sa part, si bien qu’il se demandait si ce raisonnement était sain.

“ Ah, pardon. “

Mince, il venait de s’excuser de s’être excusé.

“ Enfin je veux dire, j’y suis allé un peu fort donc je voulais savoir si tu allais bien Xia’. “

Elle semblait si fragile maintenant. Comme un petit chaton malade. Une petite poupée. Karl la trouvait aussi adorable qu’attendrissante. Son petit sourire, ses petits yeux, la manière qu’elle avait de se blottir contre lui… tout le rendait un peu plus amoureux à chaque instant. S’il ne savait pas ou tout cela les mènerait, le simple fait que de la regarder le rendait heureux. Finalement, ces films à l’eau de rose qu’il détestait avaient raison sur un point. L’amour, ça rend vraiment niais.

“ Je m’en fiche que tu sois pas propre. Viens dans mes bras. “

Dit-il en l’enserrant tendrement quand elle vient se lover contre lui. Adorable. Karl dégage un peu les mèches de cheveux collées à son front par la sueur pour pouvoir mieux regarder le visage de Xiao. Elle est si jolie, même dans cet état. A croire qu’elle portait un filtre en permanence. Ou que le filtre était directement posé devant ses yeux à lui.

“ T’as gagné mais au final, tu étais bien contente que je cède. Je m’en fiche de perdre t’façon si on baise comme ça à chaque fois. “

Dit-il en lui soufflant doucement dans le cou. Le contact de leurs peaux moites n’est pas si désagréable, même s’il indique qu’ils vont devoir prendre une douche quand ils seront un peu plus capable de faire marcher leurs muscles. Ce qui n’est pas vraiment le cas tout de suite.

“ Toi ? … “

Il laisse alors le suspens s’installer, pour venir lui chuchoter à l’oreille.

“ T’es la meilleure fille que je n’ai jamais rencontré de toute ma vie. Je ne le ferais plus qu’avec toi maintenant. “

Et si cela pouvait sonner comme une plaisanterie, Karl disait vrai. Son coeur ne supporterait pas de coucher avec une autre fille. Quand bien même les sentiments n’étaient pas partagés, il ferait cet effort. Au moins pour lui. De toute manière, il n’était pas très porté sur la chose avec autrui.

La question de Karl fait sourire Xiao. Elle rit d'un souffle, et laisse un silence se poser quelques secondes avant de répondre. "Tu te défends." Quand bien même il serait le meilleur, elle ne l'admettrait jamais. Ca n'est pas dans son éducation que de complimenter les autres sur leur performance, ou de les rassurer. L'ego est quelque chose de personnel et fragile pour certain. Se reposer sur le reste du monde pour le renforcer est malheureusement assez bancal, et si Xiao avait évolué de cette façon, elle ne serait sans doute pas ce qu'elle est. Soupirant d'apaisement, elle se blottit un peu plus contre lui en gloussant. Le voilà qui s'excuse encore, pour rien. "T'es grand et fort, t'as pas besoin de t'excuser tout le temps, si on t'emmerde, tu peux coller une droite." Pas qu'il aie vraiment besoin de le faire, c'est tout l'avantage d'une force bien visible et d'une carrure imposante. Xiao, elle, punit sans doute beaucoup plus de monde qu'il ne le fait. Sa silhouette fluette n'évoque rien de particulier à ceux qui trouvent judicieux de s'en prendre à elle, et si elle n'éprouve pas de remords à régler leur compte à ceux qui le font, tout ça peut sembler bien gratuit parfois. "Je vais très bien."

Une nouveau rire la traverse lorsqu'il admet sa victoire en tentant néanmoins de la diminuer. "Hey, je suis toujours contente quand je gagne. Même si tu y trouves ton compte, j'ai gagné." Tant mieux pour lui s'il aime ce genre de défaite. Après tout, ses victoires ont souvent des bons côtés. Lorsqu'elle gagne en abattant une cible en un temps record, les commanditaires sont heureux. Lorsqu'elle gagne à la course, son coeur apprécie l'exercice. Et dans ce cas précis, tout le monde ressort satisfait. Xiao, un peu plus que les autres. "T'avise pas de me laisser gagner sans te battre, c'est chiant, sinon." On ne lui a jamais fait de cadeau, et finalement, elle n'aime pas ça. Gagner sans défi, c'est déjà perdre un peu.

Il est confortable, Karl. Un peu comme un coussin chauffant. Xiao passe son bras dans son dos pour s'installer un peu mieux et profiter de la chaleur quand il vient murmurer quelque chose à son oreille. Voilà qu'il extrapole. Mais la chinoise aime les compliments. Elle aime qu'on gonfle son ego. Par contre, si le compliment la flatte et la ravit, le reste de sa réponse ne fait pas vraiment sens. Soudain, elle recule la tête pour le regarder dans les yeux. Son visage trahit son incompréhension. " Ben, quoi, t'as peur d'être déçu ? J'suis sûre que t'as matière à prendre ton pied avec quelqu'un d'autre. Tu dis ça parce que t'es encore perché." Même elle ne prendrait pas une décision pareille. De toute façon, tout ce qui se dit ou se fait après le sexe est con. On est idiot dans ces moments là. "Je suis p'tet meilleure qu'elles …" Elle rit. Ca peut sonner faux, mais elle s'en fiche, elle aime bien cette idée. "Celle qui arrive juste après moi serait p'tet assez pour te débarasser de tes boules bleues." Un sourire insolent se dessine sur ses lèvres. Du bout des doigts, elle tapote sur le torse de Karl. "Allez va ! C'est flatteur, mais prends pas des décisions à la con parce que l'orgasme te monte à la tête."

Quelques secondes, elle reste là, silencieuse, tantôt à le regarder, tantôt à fermer les yeux. Elle n'a même pas envie de dormir, juste une flemme puissante qui la gagne à l'idée qu'elle doit retourner sous la douche, laquelle n'a probablement pas beaucoup d'eau chaude. "Karl …" Commence-t-elle en ne sachant pas vraiment comment cette phrase va se terminer. "Tu me portes à la douche ? J'suis fatiguée."

Karl sourit. Elle n’ira jamais dans son sens décidément. Pourtant, sur l’instant, il s’en fiche. Son ego n’a pas vraiment besoin de ça. Il s’agit seulement de sa relation avec Xiao. Et ils n’ont jamais été aussi proches. Du moins, dans sa tête à lui.

“ T’avais l’air de vraiment aimer pourtant… tu veux qu’on recommence histoire d’être sûrs ? “

Dit-il, taquin. Même lui aurait du mal à assumer de nouveaux ébats, il n’en pouvait plus. Et celui-ci l’avait de toute manière rassasié pour la soirée. Et ils allaient bien finir par dormir de toute manière. Enfin, c’était du moins ce qu’il avait prévu, Karl commençait à fatiguer un peu bien que Xiao soit capable d’éveiller son attention assez facilement. Mais elle était au moins aussi abattue que lui.

“ T’as raison. Mais tu m’emmerdes jamais et je te frapperais jamais, petite chipie. Toi c’est pas pareil. “

Dit-il en lui touchant le bout du nez de l’index affectueusement. De toute manière, il ne s’était jamais imaginé se battre contre Xiao et ne s’en pensait pas capable. Encore moins maintenant. Sûrement aurait-elle rapidement l’avantage pour cette seule raison. De toute manière, Xiao ne pouvait pas vraiment l’attaquer… si ? Sa perte de connaissance quand elle a été confrontée au choix voulait tout dire pour lui. A tort ou à raison. Mais ce n’était pas vraiment le moment de se prendre la tête avec ce genre de questions, quand tout ce qui ressortait de l’instant était la tendresse.

En l’entendant dire qu’elle va bien, il ne fait que la serrer davantage contre lui, réconfortant. A vrai dire, il n’était pas sûr que son passage ne lui laisse aucune séquelle pour les jours à venir. Espérons que ce ne soit pas le cas. Karl n’avait pas vraiment envie que Xiao refuse de le faire à nouveau avec lui à cause de potentielles douleurs, bien que ce ne soit pas vraiment son genre.

“ Ouais, ouais, t’as gagné. Mais vu comment je t’ai fait jouir, j’ai une petite victoire pour moi aussi. “

Dit-il en se rappelant d’ailleurs du canapé, complètement souillé. Elle n’y était pas allée de main morte, la petite Xiao. Il l’embrassa sur le front à nouveau, souriant.

“ Je me battrais quand même Xia chérie. Je veux pas que tu t’ennuies. D’ailleurs faudra qu’on nettoie le canapé… et tes fesses. “

Dit-il. Ce n’était pas très glamour, mais le fait est qu’elle était quelque peu souillée. De toute manière, ils pouvaient tout se dire sans jouer sur les mots. C’est ce qui rendait cool, en partie, leur relation. Xiao n’avait aucune gêne, et ce côté contaminait un peu Karl à force de traîner avec elle bien que ses manières revenaient bien vite une fois seul. La jeune femme avait un petit pouvoir sur lui. Ou peut-être se sentait-il simplement à l’aise et en confiance avec elle.

“ Tu m’as débarrassé de mes boules bleues pour 6 mois au moins. “

Dit-il en enfouissant son visage dans le cou de son aimée, tendre.

“ C’est pas une décision à la con… tu verras. “

Dit-il, enivré par l’amour. L’orgasme libérait tant d’endorphine qu’il en était encore plus gaga que d’habitude. Mais ça, Xiao ne pouvait pas vraiment le savoir. Grâce ou à cause de son malaise. A vrai dire, il n’était plus tellement soucieux de ça. Karl sentait que les choses pourraient se faire naturellement entre eux, sans qu’il ait forcément besoin d’agir de telle ou telle manière. Rien que profiter de l’instant présent lui faisait énormément plaisir…


“ Avec plaisir Xia chérie. “

Dit-il en la soulevant alors contre lui, faisant en sorte qu’elle lui entoure la taille de ses jambes pour ne pas trop glisser bien qu’il la maintienne par les cuisses. Dans cette position, l’un contre l’autre, Xiao pouvait parfaitement garder la chaleur du corps de Karl contre elle. Pour lui, sentir sa poitrine contre son torse lui suffisait pour être à l’aise. Posant son front contre le sien à mesure qu’ils avançaient vers la douche, Karl lui murmura amoureusement.

“ T’es belle. “

Puis, une fois sous la douche, le jeune homme la fit couler sans se détacher de Xiao. Si elle devenait froide, son corps lui permettrait au moins de ne pas être complètement frigorifiée. Que voulez-vous, son côté protecteur ressortait facilement.

Si Xiao n'était pas littéralement hors d'état de fonctionner, les tendances tactiles de Karl l'auraient probablement crispée, peut-être pire. Mais, complètement dans le flou et la brume d'un état second nourri à la fatigue physique et psychologique, elle reste là, presque inerte, et se laisse faire. Seules ses lèvres fonctionnent, pour lui répondre, et ses doigts, pour se gratter le nez lorsqu'il le touche. Encore une araignée ? Vient ensuite le front, qu'elle essuie. C'est quoi ça ?

" Ouais … J'ferai changer les coussins, ça va …" Ce ne serait pas la première fois que ce truc se fait nettoyer à sec pour cause de soirée trop remplie. Les matins où Xiao descend de la mezzanine pour constater les dégâts de ses délires de la veille sont de moins en moins avec le temps.

Le reste est flou, Xiao est vraiment noyée dans une brume épaisse que seule de l'eau - éventuellement froide - permettrait d'enlever. Ou peut-être un déplacement imprévu poussant ses muscles à des réflexes brusques. Lorsque Karl la soulève du canapé, elle vient enserrer sa nuque de ses bras, plantant brièvement ses ongles dans son dos, avant de réaliser qu'elle est assez stable. Une chance néanmoins qu'elle ait ce réflexe, car ses jambes, bien que positionnées correctement, sont assez douloureuses et n'auraient pas supporté son poids et équilibré le reste de son corps tout seul. "Tu pouvais me porter sur ton épaule ou sous le bras, hein…" marmonne-t-elle en s'accrochant difficilement par une étreinte à laquelle elle n'est pas habituée. Lorsqu'on la portait, enfant, pour la balancer dans un vieux cagibi, on ne l'étreignait pas de cette façon. Au moins, là, elle n'a pas froid.

Le compliment qu'il lui offre lui fait principalement lever un sourcil de jugement. "On a déjà baisé, Karl." Elle pousse un soupir et vient caler sa tête sur son épaule. "T'as pas besoin de me complimenter." Il est étrange, ce compliment. Il semble gratuit, sorti de nulle part, et faux. Peut-être des années de conditionnement pour la détacher de son individualité, de son ego, et même de son corps. Enfant, à la Triade, elle était la petite laide et puante du Sichuan, dont les autres enfants - esclaves et aussi mal lotis qu'elle, d'ailleurs - se moquaient. En toute honnêteté, c'était chacun son tour. Alors, être complimentée sur son physique de façon aussi directe semble évidemment motivé. Pourtant, quelque part au fond de son coeur épuisé, Xiao ressent comme une chaleur qui la pousse à sourire. Un petit instant de joie qu'elle ne s'aviserait jamais de montrer.

Arrivée sous la douche, l'eau la recouvre à peine qu'elle se sent déjà plus éveillée. Elle ne reste pas plus d'une courte minute accrochée à Karl avant de redescendre sur ses jambes. C'est douloureux, elle tangue un peu, et finit par s'appuyer sur une des parois en fermant les yeux quelques secondes. A la simple mémoire des gestes, elle saisit un pain de savon au jasmin et  commence à se laver, les gestes poussifs. "Faut qu'on fasse vite, on va vite avoir froid." Les phrases sont sommaires et manquent de précision. Elle voulait parler d'eau froide, mais pas le temps pour les longues explications. Sa toilette aussi, est assez sommaire, et elle finit par coller le pain de savon dans la main de Karl au bout d'une simple minute avant de se placer sous la douche, la tête en arrière, les yeux clos. "Tu dors ici, alors ?"

Karl la portait précisément pour qu’elle se sente bien, contrairement à ce qu’elle avait dû vivre plus petite. On ne porte pas quelqu’un à qui l’on tient dans cette position. Bon, on ne se colle pas nu à un inconnu non plus. Quoique pour Xiao, la question pourrait se poser.

“ Ce serait moins confortable. Comme ça tu as chaud au moins. “

Dit-il, toujours aussi attentionné. Ça ne pouvait pas lui faire de mal. Même au plus profond d’elle, la jeune femme devait sûrement avoir besoin d’attention. S’il n’espérait pas la voir l’avouer un jour, lui en donner un peu suffisait à lui faire plaisir. Et à elle en retour, il l'espérait. De toute manière, faire les choses de manière intéressée serait contre productif avec elle. D’ailleurs elle le lui rappelles bien.

“ Je fais pas des compliments que pour baiser, tête de linotte. “

Il accueille sa tête en la maintenant d’un bras.

“ J’en ai pas besoin, j’en ai envie. Parce que c’est vrai et que je tiens à toi. “

Quelle fleur bleue, ce Karl. Le jeune homme espérait quelque part que la jeune femme puisse comprendre des concepts aussi simples. Il ne demandait rien d’autre. Du moins pour le moment. Karl n’avait d’ailleurs aucune idée de la réaction qu’avait pu avoir Xiao, pensant qu’elle serait juste passée au dessus une fois de plus. Quelle aurait été sa surprise s’il avait pu constater que ce n’était pas le cas.

Une fois sous la douche, le jeune homme la laisse redescendre quand elle le souhaite et se rince d’abord, la laissant avec le pain de savon. Alternant ensuite avec elle, Karl commence à se savonner tout en la regardant. Ou peut-être en l’admirant.

“ Si t’as froid colle toi à moi. Je suis la pour ça. “

Dit-il en lui faisant un clin d’oeil avant de la rejoindre pour se rincer. Il lui faut un peu plus de temps dû à sa taille, mais il parvient finalement à se laver avant l’arrivée d’eau froide. Ce serait assez désagréable étant donné que la température extérieure n’est déjà pas très élevée. Karl est certes une bouillotte, mais il reste sujet au froid.

“ Ouaip. J’habite pas à côté et comme ça on aura chaud ensemble. Ça te fait plaisir ? “

Dit-il en sortant de la douche avant d’attraper une serviette pour la lui lancer, et d’en prendre une pour lui en commençant à se sécher. Pas besoin de se rhabiller pour dormir de toute manière. Surtout avec elle. Secrètement, Karl espère bien que cette nuit durera l’éternité.

"Je vais finir par t'appeler radiateur si tu veux toujours que je me colle à toi quand il fait froid." Xiao rit à cette idée, et l'imagine accroché au mur, nu, en train de réchauffer une pièce. Un petit sourire au coin des lèvres, elle termine de se rincer en fermant les yeux avant de s'écarter pour l'attendre. Déjà plus réveillée, la chinoise sent ses muscles se détendre lorsqu'elle essore ses cheveux. Elle reçoit la serviette en constatant que ses réflexes reviennent. "Plaisir ?" Bien qu'éveillé, son esprit patauge face à cette question. Elle hausse les épaules. "C'est cool." Difficile de répondre à ce genre de question avec l'approche pragmatique qui la caractérise. Xiao y voit des avantages matériels, elle n'aura pas besoin de se réchauffer, pas besoin de le raccompagner, et sa tendance à l'étreindre l'aidera à s'endormir. La chinoise aime avoir un poids sur elle ou être compressée, pour s'endormir. "Tu prends pas tout le lit, hein ?"

Amusée, elle le pousse un peu pour sortir de la salle de bains. "C'est que t'es grand et large, l'air de rien !" Et puis, quand son regard redescend vers l'entrejambes de Karl, elle hausse les sourcils. "Tu voudras les loutres, du coup ?" Réalisant le manque de clarté. "Enfin, le short. Avec les loutres. C'est p'tet plus confortable pour dormir ? Je sais pas trop." De son côté, Xiao n'a pas l'intention de remettre le moindre vêtement avant le lendemain. Même si elle doit souffrir un peu du froid jusqu'à ce qu'elle s'installe sous les draps, mais il y a fort à parier que le salon soit bien réchauffé par leurs ébats. "Il est resté en bas de toute façon, sers toi comme tu veux. Tu me rejoins là-haut quand t'as fini ?"

Xiao fait sa petite vie. Elle éteint la télévision - même depuis la mezzanine, les reflets lumineux sur les murs l'empêchent de dormir, elle qui couvre souvent jusqu'à sa tête sous les draps pour avoir un noir absolu. Puis, elle vient escalader l'échelle menant à sa chambre en mezzanine. En s'avançant vers le lit, elle bute sur un interrupteur, lequel allume à la fois plusieurs guirlandes colorées, une lava lamp et … une vieille chaîne hifi, dont le son est réglé au maximum. Sur un album de Nightcore. La musique résonne, fait trembler les murs, et sous la panique, Xiao met bien trente secondes à retrouver l'interrupteur que son pied à envoyé à deux mètres d'elle. Un réflexe de panique. "Nononon !" Xiao est égocentrée, mais ne cherche pas à ce point les ennuis. Des deux mains, elle appuie sur l'interrupteur capricieux, avant de pousser un long soupir de soulagement. Bon sang, pourvu que les voisins croient à un rêve, elle n'a pas envie de discuter - encore, pour la énième fois - de son incivisme, son impolitesse, son inconséquences et encore tout un tas d'autres termes qu'elle ne comprend pas et ne veut pas attendre.

Préférant s'occuper les mains qu'imaginer ce qui pourrait mal tourner avec ses rabat-joie de voisins, elle récupère le sac de jouets montés un peu plus tôt et s'affaire à les ranger, par taille et par couleur, dans le tiroir de la large commode consacrée à ce type d'accessoires. Toute fière, elle s'affaire à trier, comparer, et constater les objets qu'elle n'a pas utilisés depuis longtemps ainsi que ceux qui, bien que sortis de leur boîte pour être affichés, n'ont jamais pu servir. Le sourire aux lèvres, Xiao a le rose aux joues, comme à chaque fois qu'elle agrandit sa collection. Tous les tiroirs sont ouverts, pendant qu'elle trie et range, jetant les boîtes une à une à travers la mezzanine pour les faire atterrir - avec un peu de chance - dans le salon. Pourvu que personne ne se trouve sur la trajectoire, bien sûr.

Karl bâille. La fatigue se fait sentir, quand bien même il lui est déjà arrivé d’enchaîner plusieurs nuits blanches. Ce qui n’est pas très recommandable pour un sportif, encore moins professionnel. Sa condition physique n’était pas seulement due au sport, mais aussi à une hygiène de vie quasiment irréprochable n’ayant droit qu’à quelques exceptions.

“ Bah, j’peux être ton radiateur perso. “

Dit-il en s’étirant, et faisant craquer ses os au passage assez bruyamment. On sait depuis des années que c’est inoffensif de toute manière. Le jeune homme plie ensuite sa serviette soigneusement comme d’habitude et la pose sur un séchoir ou toute autre surface pratique du genre. S’il n’est spécialement ordonné chez lui, c’est autre chose chez les autres. Particulièrement avec Xia, bien qu’ils aient mis un bordel conséquent. Bordel qu’ils allaient peut-être devoir ranger le lendemain, Karl en soupira à l’avance.

“ Cool, ouais. “

Il allait devoir s’en contenter.

“ Non, non. T’façon si on est collés ça risque de réduire l’espace qu’on prend. “

Répond t-il en se frottant les yeux. Il réprime même un bâillement, qu’il ne couvre même pas. Ce gros pâteux a même besoin qu’on le pousse hors de la salle de bains sans quoi il se traînerait encore. D’ailleurs, l’entrée fait presque la largeur de ses épaules si bien qu’il sort en biais.

“ Ouais, ouais. J’sais. C’est maintenant que tu le remarques ? “

Dit-il avec un demi sourire, constatant qu’elle lui mate l’entrejambe sans vergogne. Elle veut le refaire, encore ?

“ Les loutres ? Ah, le short. Ouais, si possible. C’est pas que voila, mais fin tu vois quoi. “

Aucune idée exprimée en tant de mots, c’est un record à mettre sur le compte de la fatigue en plus de sa douleur à la tête qui revient. Brièvement, le jeune homme se tient l’arrière du crâne et s’affaire à récupérer un short. Il n’a pas vraiement envie de dormir à poil contre Xiao, qui sait ce qui pourrait se passer dans son sommeil comme ça. Le jeune homme jette d’ailleurs un coup d’oeil à la mezzanine. Il ne faut pas oublier qu’il pèse 100 kilos au bat mot.

“ Euh… elle supporte combien de poids au max, ta mezzanine ? “

Dit-il en enfilant son short loutre d’une main. Malheureusement, la fatigue le fait tanguer et comble du ridicule, la jeune femme actionne la musique à l’instant ou il ne tient plus que sur un pied pour enfiler la deuxième manche du short. Le bruit assourdissant le fait sursauter, basculer, et le gaillard s’écroule sur la table basse qui se brise littéralement en deux sous son poids. Du nightcore en plus. Enfer et damnation, par tous les dieux. Xiao écoute vraiment ces horreurs ? Espérons que ce soit une erreur, enfin c’est ce qu’il espère du moins. Il ne manquerait plus que ça. Une fois qu’il parvient à se relever, ce qui met 20 bonnes secondes, le jeune homme remet finalement son short correctement.

“ Bon… j’espère que c’était pas une table très chère, je t’en paierais une autre. “

Le jeune homme s’approche alors de l’entrée pour éteindre l’interrupteur mais s’arrête en plein mouvement. Il y a du bruit dans le couloir. Comme si quelqu’un courait. Plusieurs personnes même. Curieusement, le jeune homme pose son oreille pour mieux entendre ce qui peut bien se passer de l’autre côté. Grave erreur, quelqu’un ouvre la porte sans même frapper et l’éclate en pleine tête du gaillard, qui ne bouge pas d’un centimètre. Au contraire, la porte “rebondit” contre lui et se ferme immédiatement avec la force de l’impact. Le jeune homme se recule alors, grognon, et voit débarquer plusieurs personnes furieuses. Ce ne sont pas seulement les voisins, c’est tout le voisinage qui débarque.

“ Bordel, c’est pas fini vos putain de conneries ! Déjà qu’on vous entend baiser pendant UNE HEURE, et main- “

Karl le coupe dans son élan en lui envoyant un boulet de canon directement dans les dents, ce qui l’envoie bien trois mètres en arrière, bousculant les voisins derrière comme un jeu de quilles.

“ On frappe avant d’entrer connard. “

"C'est en dur et j'ai des meubles là-haut, donc pas mal, pourquoi ?"

Un jouet à la main, Xiao sursaute en entendant quelque chose se briser. A en croire le bruit, quelque chose en bois, ou simili. Au début, elle ne panique pas spécialement, avant d'entendre la remarque de Karl. Elle se précipite alors sur le rebord de la mezzanine pour constater les dégâts, qu'elle ne peut malheureusement pas voir depuis l'étage. "Sérieux ? t'as pété la table ?" Elle le suit des yeux quand il s'avance vers la porte et assiste à une drôle de scène qu'elle ne saurait décrire. La porte qui s'ouvre à la volée, rebondit bêtement sur Karl, sans qu'elle n'ait le temps d'apercevoir qui se trouve de l'autre côté.

"Qu'est-ce que …" Attrapant une culotte au hasard au pied de son lit - ranger les vêtements propres n'est pas vraiment son fort - elle l'enfile pour descendre et se retrouve finalement et est témoin d'une scène encore plus absurde et surprenante. L'un de ses voisins, accompagné de … plus ou moins tout l'immeuble, à en juger par les quelques têtes connues et le nombre de personnes, se met à hurler. Elle s'apprête à répondre, fermer la porte et la verrouiller pour laisser les problèmes de l'autre côté en attendant qu'ils la bouclent et rentrent dans leurs confins, lorsque Karl fait montre d'un visage contrastant radicalement avec celui qu'il affichait jusque là. "Que ?"

La chinoise n'a pas pour habitude de négocier, s'excuser, ou temporiser quoi que ce soit. Mais sa situation dans cet immeuble est bien trop confortable pour qu'elle ne la risque bêtement. Elle est même étonnée que Karl prenne une telle initiative, tant il a pu lui sembler conciliant auparavant. Descendant d'un saut de la mezzanine, elle atterrit juste derrière son ami dont elle attrape le bras, fermement, pour le forcer à reculer. L'air contrit, elle pose son regard sur les intrus restants qui, eux, la détaillent de la tête au pied, et constatent son impudeur. "Quoi ? C'est bon ! On a pas fait exprès, on va se coucher, on fera plus de bruit, c'est bon."

Ses yeux passent de Karl aux voisins estomaqués, encore sous le choc de voir voler un être humain à trois mètres derrière et, dans la foulée, une jeune femme nue et loin d'être gênée de l'être. "Rentrez chez vous ! Allez vous coucher !" Lance-t-elle encore en fermant la porte, cette fois, en tournant tous les verrous qui la composent. C'est généralement ainsi qu'elle gère les querelles de voisinage, leur fermer la porte au nez, les ignorer jusqu'à ce qu'ils s'épuisent. Ça ne la ressemble pas, d'être aussi inconsciente. Une fois bien enfermée chez elle, elle se retourne, silencieuse, et lève un regard mêlant colère et incompréhension vers Karl. Quelques longues secondes, elle l'observe ainsi, toute petite face à sa carrure qui semble plus menaçante que jamais.

Mais la chinoise ne s'adoucit pas pour autant. Sans un mot, elle s'éloigne et le laisse là, remontant dans la mezzanine pour se glisser sous la couette. Crispée, elle se couvre jusqu'à la tête, comme cachée du monde, et se replie en position foetale. Le silence est pesant dans l'appartement, alors que le couloir, lui, sonne chaotique.

Karl a vraiment l’air désolé pour la table, mais la situation n’en est pas aux excuses. Par réflexe, le jeune homme tend le bras pour couvrir les seins de Xiao, remplissant sa pudicité à sa place. Bras par lequel elle tente de le faire reculer, mais Karl ne bouge pas d’un millimètre. Quand le jeune homme n’a pas envie de bouger, il ne bouge pas. Et ce n’est pas la petite Xiao qui y arrivera. A vrai dire, la frustration plus ou moins accumulée au long de la soirée mêlée à la fatigue le fait entrer en colère, chose avec laquelle il ne vaut mieux pas jouer avec Karl. S’il peut être un ange avec ses proches, le jeune homme est un tigre avec les autres.

“ Ouais c’est ça, dégagez de la avant que j’vous défonce tous. “

Dit-il, sur les nerfs. S’il réfléchissait un peu, Karl se dirait sans doute qu’ils étaient en tort et que venir se plaindre était tout ce qu’il y a de plus légitime. Mais il fallait bien qu’il évacue d’une manière ou d’une autre, et cet incident était un prétexte parfait pour ça. En baissant les yeux, il croisa le regard de Xia qui se confronta au sien, déjà un peu moins menaçant qu’avant. Encore une dispute ? Karl avait assez donné. Le jeune homme préféra retourner vers la table basse, l’observant d’un air contrit.

“ … “

Le jeune homme se massa les tempes, et s’accoupit devant. Autant en racheter une que de la réparer, elle serait trop fragilisée de toute manière. Tant pis. Il n’avait qu’à faire en sorte de lui en ramener une le lendemain et ils n’en parleraient plus. Sauf si elle y accordait une valeur sentimentale, mais Karl n’y pourrait rien. Le jeune homme n’avait vraiment pas envie de se prendre la tête une fois de plus avec elle. Et au vu du canapé, il n’allait certainement pas dormir la dedans. Il n’allait quand même pas devoir rentrer chez lui ?

“ Tu me fais la tête ? “

Demanda t-il, neutre. C’était la troisième fois de la soirée, et sûrement celle de trop. La fatigue, les événements d’avant, Karl n’avait plus d’énergie à consacrer à ça.