Event Hurricane - Groupe 11

Au fond du fauteuil passager de sa Lexus LX, la main droite accrochée sur la poignée intérieure et le visage fermé, les yeux rivés sur la surface d’un mobile qui ne cesse de vibrer, Matsunaga Takeshi, du clan des Kawashii-Yama, n’aurait jamais pu paraître plus pensif qu’à cet instant. Keigo se débrouille bien cependant, à maintenir les 4 tonnes de la berline sur la route tandis que les bourrasques fouettent le véhicules en séries de lames invisibles qui font crisser et tordre sa carrosserie blindée. La prise ferme, les informations qui se succède sont alarmante… Les instructions ont étés données, les siens se battent et tentent de porter secours aux habitants du quartier, unis aux autres clans. Le vieil oyabun sourit sans que la moindre joie n’apparaisse sur ses traits, probablement cynique de comprendre que les catastrophes seules sont capables de souder les esprits les plus divisés.

Mais il n’a pas le temps de penser au delà, un fracas sourd survient, le pare brise se fissure sous l’impacte lourd d’un vaste obstacle. Le jeune shatei hurle de surprise, la roue droite rencontre le trottoire à pleine vitesse, le choc fait virer le véhicule si soudainement qu’il est emporté par son propre poids, aidé par la tourmente d’un vent furibond. Takeshi s’agrippe, il serre les dents, ses sourcils sont froncés, jugeant l’instant présent comme si celui-ci était indigne. La surface diaphane de la vitre avant s’ouvre sur un corps qui pénètre l’habitacle sous le regard horrifié du conducteur et tandis que l’entièreté de la Lexus vole littéralement sur le toit. Froissement d’acier contre le bitume. Martèlement du cuir malmené des corps qui s’animent. Déchirure. Dislocation. Destruction. Puis plus rien, sinon le sifflement moqueur de la tourmente cyclonique qui s’infiltre par les nombreuses fractures de la limousine. Takeshi ouvre les yeux subitement.

Rien autour de lui ne pourrait lui permettre de savoir depuis combien de temps il se trouve ainsi la tête à l’envers, l’odeur de l’essence et du sang mêlé empestant tout autour de lui et ce visage grimaçant qui le fixe derrière des lunettes brisées.

Keigo…

La position de son cou ne laisse aucune place au doute quant à son sort. C’était un bon garçon. Mais le temps pour le pleurer viendra plus tard. C’est du moins l’impression que donne le petit père des rues tandis qu’il avise ce qui l’entoure. Sa ceinture le maintien au fauteuil, il cherche son tantō dans son obi, sans l’y trouver. Il peste et jure, puis se ressaisit, ses iris tombant sur la tsuka de son katana qui gît sur le plafonnier de la voiture. Il libère l’arme de son fourreau et fait doucement glisser sa lame sur la lanière de son harnais, se préparant déjà à recevoir sa chute. Celle-ci vient aussitôt, suivi d’un craquement sonore. Une côté, ou bien sa clavicule, vient de céder. Il doit certainement faire montre d’une incroyable emprise sur lui pour ne pas crier sa douleur, quand bien même son expression ne saurait mentir.

Alors il s’extirpe par la fenêtre disparue de sa portière, gisant et glissant dans le tumulte d’une cité en guerre contre la nature. Trop vieux, trop blessé, trop usé… Il ne semble pas avoir le temps de considérer ces points et à l’aide de son arme, se remet sur ses pieds tremblants pour fixer les cieux avec une haine farouche et un défi apparent.

Car jamais on a vu Matsunaga Takeshi s’incliner sans le souhaiter, ni être obligé de le faire. Et il apparaissait qu’un ouragan ne ferait pas exception en lui imposant cela.

Pourtant défaille-t-il, tombant face contre terre, ses paupières à demi-closes luttant de toute évidence contre l’inconscience et ses prunelles fixant les chevilles d’une jeune femme debout non loin de lui...

HRP:

Les déferlantes de vent couvraient les grands cris que poussait Salome en comprenant que Bijou ne répondrait pas à sa question. Tu es en sécurité ? Avait-elle pu gueuler entre deux bourrasques qui avaient manqué de l'emporter tandis qu'elle tentait de trouver un abri en esquivant d’instinct les mouvements de foule pourtant bien contenu par la discipline légendaire des Yakuza. Bordel, Bijou.... il fallait que le brune la rejoigne, s'assure qu'elle allait bien. L'angoisse démarra comme un grand feu dans ses veines, agitant son corps transi de froid mais échauffé par la volonté instinctive de vivre qui l'avait fait courir plutôt que marcher. Ses pieds nus glissèrent sur le sol inondé et la jeune femme tomba sur le flanc, perdant son téléphone par la même occasion. Putain, le seul moyen de contacter sa jumelle... il fallait qu'elle se calme, et qu'elle se rappelle de leur plan : si elles étaient en danger, il fallait qu'elles se retrouve à la planque. La planque... Elle qui voulait passer à l'Orochi pour y retrouver sa nouvelle amie Sae - et manger éventuellement à l'oeil - voyait sa soirée bien différente de ses espérances...

Salome avait hurlé contre les grandes ondés, invectivé ce terrible coup du sort qui n'aurait pas sa vie ce soir, grondé contre ces cieux capricieux qui n'auraient pas sa peau. Elle se releva rapidement pour rester en mouvement, espérant ainsi éviter les débris volants et se trouver un coin en attendant que ça passe. Courir, sans se retourner. Courir, si on voulait vivre. Le cœur battant la chamade, la jeune femme pousse un long hurlement en voyant une voiture se faire emporter dans les bourrasques et partir en un terrible tonneau, juste devant elle. La surprise passée, elle demeura sidérée, plantée sur place avant de se reprendre. Il y avait des gens dans cette caisse !

"SCHMOCK !", jura le jeune femme dans son yiddish natal en se précipitant sans réfléchir vers le véhicule retourné, constatant qu'un homme en sortait comme il le pouvait, "p'tain, ça va m'sieur ? J'vais vous sortir de là !"

La jeune femme aux pieds nus, portant uniquement un t-shirt, un short en jeans et un très vieux perfecto élimé ne chercha pas plus loin et se pencha sur le vieil asiatique en bravant le danger du véhicule agité par les vents et tout le reste : peu lui importait, car malgré sa crainte il lui était impossible de laisser quelqu'un dans une telle situation. Saisissant l'inconnu aussi délicatement que le sentiment d'urgence le lui permettait, la brune le tira hors de la carcasse retournée pour essayer de le maintenir débout.

"Oh !", l'invectiva-t-elle en craignant qu'il ne soie inconscient, "Tenez bon ! On est pas loin d'un restau, on va voir si on peu s'y abriter !"

Non loin de l'Orochi, elle l'espérait mais en réalité, Salome ne savait pas trop où elle était à part dans la merde.

HRP:

Les ordres sont contradictoires, pour cette journée. Clairs, mais contradictoires. D'un côté, le conseil annonce que chacun aura une mission, un poste défini. De l'autre, le paternel Maeda intime à sa fille de rester cloîtrée, à la maison ou au restaurant. La menace même de tout un tas de choses parfois peu claires si elle avait le malheur de mettre sa vie en danger. Parce qu'elle est l'espoir du clan - ou tout du moins le sien de voir son propre sang prendre sa suite. Une lubie qui lui a pourtant déjà coûté très cher.

C'est dans son restaurant qu'elle s'est alors enfermée, accompagnée de son chien Hakuzosu. Elle n'imagine pas quelque chose de si énorme que ça, peut-être une tempête un peu violente, et regrette de ne pas pouvoir accueillir la clientèle comme d'habitude, ou recevoir sa livraison de viande. Elle qui avait hâte de tester ses nouveaux couteaux sur une belle pièce de wagyu.

Très vite, les conditions à l'extérieur la forcent à reconsidérer sa position, et comprendre celle de son père. Peut-être qu'il ne s'agit pas d'une grosse pluie inspirante pour ses écrits et l'invitant à se faire un bon chocolat chaud dans les cuisines du restaurant. Peut-être est-ce vraiment dangereux, finalement, et que les mesures imposées par le Conseil ne sont pas si idiotes. Cette idée semble se confirmer lorsqu'elle voit passer une forme impossible à discerner, à toute vitesse devant la vitrine de l'Orochi, pour venir s'écraser sur une voiture avec fracas. De toute évidence, il ne s'agissait pas là de quelque chose de léger.

Le coeur de Sae se met à se serrer dans sa poitrine alors qu'elle songe à ceux qui, peut-être, n'ont pas été informés et aussi bien protégés qu'eux. Dans quelle panique sont-ils ? D'un coup d'oeil, elle regarde son téléphone dans l'espoir d'avoir des nouvelles de ses frères. Rien.

Cet instant d'inattention lui coûte cher. La porte arrière du restaurant donnant sur l'autre rue s'ouvre à la volée, sans que personne ne semble s'y présenter. C'est alors que Haku se met à aboyer, paniqué, acharné comme elle ne l'a jamais vu. Et avant qu'elle ne trouve l'occasion de l'apaiser d'une caresse affectueuse, il part en courant et sort avant que la porte ne se referme en claquant. "HAKU !!" Hurle-t-elle en se précipitant à sa suite. Elle attrape au passage les premières sangles qui lui passent sous la main, amassées sur le comptoir du bar où elle attendait que le temps file. Un sac en bandoulière contenant un nécessaire qu'elle jugeait inutile jusque là, et une de ses lames - au cas où, pour la paix de l'esprit. Ce n'est pas comme si elle pouvait trancher l'ouragan en deux.

Dehors, tout est chaotique. Suivant la silhouette claire de son chien, elle se retrouve sur la rue principale, puis traverse une partie du quartier. A bout de souffle, elle tente d'appeler Haku, lui ordonner de la retrouver, mais il semble comme possédé, lancé à la poursuite d'une proie invisible à la trajectoire incertaine. Sous la pluie battante et les vents manquant à plusieurs reprises de la faire décoller, Sae ne réalise même pas à quel point elle s'éloigne de son établissement. Et lorsqu'elle voit enfin Hakuzosu s'arrêter, elle songe tout d'abord à un mirage. "Salome ?" Mais que fait-elle ici, au milieu de l'ouragan, en plein Kabukichô ? La furtive idée qu'elle puisse être là pour elle lui traverse la tête mais le rouge n'a pas le temps de lui monter aux joues qu'elle aperçoit la silhouette très légèrement familière d'un vieil homme qu'elle tire d'une carcasse de voiture retournée.

"Haku, écarte toi !" Lance-t-elle au chien qui s'exécute enfin, laissant un peu d'air à l'homme dont Sae peine à se rappeler l'identité mais qui continue de lui titiller la mémoire. "Monsieur ! Venez monsieur !" A son tour, la Maeda vient au secours du vieil homme qu'elle tente de soutenir, elle aussi, en le tenant par le bras. "Je sais pas si on pourra aller jusqu'à chez moi, mais il y a un restaurant dans la rue derrière ! Par ici !" S'exclame-t-elle en forçant le mouvement. Sa panique est si grande qu'elle doit se sentir jusque dans les maisons alentours. Mais à chaque petit objet, chaque débris insignifiant qui les frôle, la terreur l'emplit un peu plus et les larmes se mettent à couler. "Appuyez vous sur nous !"

Spoiler:

La main ferme sur la poignée de son sabre, Takeshi leva le regard sur la jeune femme qui le hêlait. Peu probable était le fait qu’il parvienne à la comprendre, néanmoins, il se laissa supporter, crissant des dents tandis que sa jambe d’appuie se tendait sous son poids pourtant libéré en partie par l’aide qu’il recevait. Mais le yakuza était la figure la plus fière au sein de l’ordre le plus fier de tout Decay. Il expira lentement, forçant ses yeux à s’ouvrir, peut être même à rappeler son esprit à la conscience. Alors même qu’il semblait revenir à lui, il fut de toute évidence surpris de recevoir l’aide d’une seconde fille qui passa sous son bras armé sans que le fait n’apparaisse la déranger. Le fait était certain qu’il ne l’avait pas entendu arriver et cela le frustra assez longtemps pour que ses traits l’affichent un instant.

Pour autant, il se laissa faire en partie, aidant du mieux qu’il pouvait par la force lui restant dans les cuisses. Les drogues naturelles que son corps avaient dû produire durant l’accident débutaient de faire effet et lui permirent de se redresser quelque peu avant de s’adresser à l’une, puis à l’autre de ses aides impromptues. Sa voix était éraillée, mais ferme, éliminant l’idée que ses poumons puissent avoir souffert de son drame automobile :

Domo arigato gozaimasu… A vous deux. Il inspire difficilement et ajoute. Le restaurant. Bonne idée. Il ne semble que faire partiellement attention, s’exprimant uniquement en japonais, mais assez pour voir ce qu’il y’a à voir, il porte sa considération sur la nippone à sa droite, comme ayant décelé que l’humidité sur ses traits n’était pas uniquement dû à la météo chaotique qui s’abattait sur la cité. Dozo dozo, kodomo. Vous êtes incroyable de parvenir à me secourir ainsi… Il se détourne en baissant la tête et tousse, puis se redresse. Je suis Matsunaga Takeshi, honoré de vous rencontrer vous toutes, je vous suis redevable. Faisons ensemble que cette journée ne soit pas un total fiasco, n’est ce pas ?

Le sourire si franc qu’il offre alors, révélant toutes ses dents, tranche si radicalement avec les lieu qu’il tient de l’irréel. Pourtant n'apparaît-il pas forcé dans sa bienveillance. N’est-il pas un vieil homme, piégé dans son corps meurtrit, mais sur qui on devrait compter par l’esprit ? C’est à cet instant précis qu’il remarque le chien de sa seconde aide, ayant l’air d’avoir recouvré l’ensemble de sa conscience. Oh… Souffle-t-il… Voilà un allié qui pourrait être des plus précieux. Conclu-t-il sans expliquer au delà le cheminement de sa pensée.

HRP:

Femme d'action plus que de réflexion, il ne fallut pas longtemps à Salome pour se lancer au secours de l'homme coincé sous sa voiture et l'extirper doucement de la carlingue déformée, relevant la tête en entendant son prénom lançé dans les bourrasques. Avait-elle rêvé ? Son regard inquiet se posa sur un chien, puis sur une silhouette connue.

"Sae !", hurla la jeune femme contre le vent, mais guère étonné de voir l'asiatique ici, "merci !"

Pas le temps de tergiverser ou de se saluer proprement, le plus important était de soutenir ensembles le blessé et de se mettre à l'abri. Sans perdre de vue son objectif - s'en tirer et retrouver sa sœur à la planque - la brune força le mouvement avec tout le groupe ; le vieux demeurait très calme malgré la situation et elle salua mentalement son sang-froid, bien qu'elle ne compris absolument rien de ce qu'il dit à part quelques bribes, comme un certain merci, et son nom. Elle mit cela sur le fait que le japonais devait être sonné et lui rendit un sourire franc en écho ; malgré son angoisse, elle était du genre optimiste, et volontaire.

"J'suis Salome m'sieur. Désolé mais j'parle pas japonais..."

Franche et simple, comme toujours. Elle prit difficilement la direction donné par Sae qui connaissait le coin et entendit le vieux dire un truc concernant visiblement le chien. Que disait-il ? Pas le temps d'y réfléchir. Elle sentit l'angoisse de la japonaise et remarqua après un instant que cette dernière pleurait - la terreur. Elle ne pouvait que comprendre mais lui offrit un sourire rassurant, protecteur. Sae avait toujours cet air de pauvre chiot abandonné qui lui serrait le cœur quoi qu'elle fasse. Le vent lui fait plisser les yeux, et elle ne voit pas grand chose.

"Ça va aller trésor, j'suis là", Salome se déporta sur la gauche pour aider le groupe à glisser dans une ruelle dans l'espoir d'éviter les débris qui dansaient dans le vent, "j'laisse tomber personne. La ruelle, là ! On y sera un peu plus en sécurité !" Elle raffermit sa prise sur celui qui disait appeler Takeshi, sans faiblir, "Tenez bon m'sieur. On laissera pas cet ouragan nous avoir", puis à elle-même, sur un ton plus bas, "j'dois retrouver ma sœur."

HRP:

Si l'urgence lui fait oublier toutes les politesses et les ronds de jambes pourtant bien inculqués par son paternel, lorsque le nom du vieil inconnu parvient enfin à ses oreilles, Sae ne peut réprimer un bruyant halètement de surprise. Le reste de sa phrase passe rapidement à l'as, ne laissant dans son esprit que le constat qu'elle supporte sur son épaule ni plus ni moins qu'un des grands Oyabun du Conseil. Elle qui n'a qu'un demi-pied dans son propre clan mais une éducation allègrement basée sur cette allégeance sent son sang se glacer dans ses veines. Non seulement elle sauve un honorable petit vieux, mais la vie dudit honorable petit vieux est bien plus importante que la sienne. "Bien sûr monsieur, bien sûr !" Répond-elle en japonais, entre deux sanglots coincés dans sa gorge, tentant maladroitement de s'incliner tout en réalisant que ça n'a rien de pertinent dans la configuration actuelle.

Bon sang, mais quel tempête dans sa tête et dans son coeur. D'un côté Salome, qui ne comprend rien de ce que raconte l'Oyabun amoindri, et de l'autre la mission de sa vie. L'incarnation vivante mais épuisée de toutes les attentes de son père. La voix de l'autre jeune femme vient néanmoins la sortir de la tourmente dans laquelle elle s'apprête à se vautrer allègrement. "Merci, Salome !" Elle lui adresse un sourire, avant de reporter son attention sur Haku, qui semble s'être attiré les faveurs du vieux. Il n'a décidément jamais à forcer pour avoir du succès, celui-là. "Haku ! File devant ! Va voir à la porte !" Lui ordonne-t-elle en désignant l'endroit d'un signe de tête. Le chien file comme une balle, évitant au passage quelques débris comme s'il avait fait ça toute sa vie, et s'éclipse dans la ruelle, ne signalant son emplacement à sa maîtresse que par son aboiement régulier.

" Ok, on y v-" Sae tente tant bien que mal de motiver les troupes, mais est interrompue lorsqu'elle reçoit une chaussure dans la tête. Rien de bien méchant, un petit format de ballerine, quelque chose de léger mais néanmoins surprenant. "On y va !" S'exclame-t-elle autant pour se motiver elle-même que pour relancer le mouvement de plus belle. Un pas, puis l'autre, avec lenteur et difficulté, de quoi éveiller tous ses sens et faire souffrir ses muscles déjà crispés par l'angoisse. "On approche !"

Lorsqu'ils parviennent enfin à un coin de rue où les débris se font peu nombreux, elle défait doucement sa prise un instant, puis explique, d'abord à l'Oyabun, en japonais. "Je vais très vite voir si je peux ouvrir, je reviens dans quelques secondes … Dix secondes ! Maximum !" Dans la panique, Sae ne se pose pas de question, et répète peu ou prou la même chose en anglais à Salome. "J'vais essayer d'ouvrir, je reviens, tiens le bien !" Alors, à toute vitesse, elle rejoint Haku, lequel aboie après une porte épaisse qui ne semble pas décidée à s'ouvrir. Lorsqu'elle tente sa chance, rien de mieux, et pire encore : aucune réponse.

Spoiler:

Se laisser ainsi traîner par deux jeunes personnes avait de quoi toucher l’orgueil du plus humble des maîtres. Pour autant, leur aîné de loin n'affichait guère un tel sentiment, son visage de toute évidence concentré sur un hypothétique point fixe vers lequel ils paraissaient se diriger tous trois. Chaque pas était une souffrance certaine, mais petit à petit, il semblait s'accoutumer à la douleur, l’acceptant et la laissant passer sur lui. Il tourne les yeux vers la prénommée Salome, qui a parfaitement compris les présentations, l’écoute sans le moindre doute. S’il se sent désolé d’avoir usé de sa langue maternelle sans vraiment s’en rendre compte, il n’en montre absolument rien. Tout à leur cavalcade éclopée, il fait glisser ses iris vers la seconde, japonaise selon toute vraisemblance. Elle, elle l’a compris et au haussement de son sourcil droit, il était certain que Takeshi voyait bien plus que cela dans le niveau de perspicacité de la nippone. Au travers le tumulte et les pas hasardeux, l’oyabun soupir, comme honteux de lui-même finalement.

J’ai compris. Dit-il en maugréant dans un anglais impeccable et pourvu d’un accent prononcé tandis que Sae prenait les devants en desserrant sa prise,. Ne répétez pas deux fois les mêmes choses alors que le temps est devenu si cher. Elle n’aurait pas pu l’entendre, partie comme elle l’avait fait. Mais ses propos devaient probablement être pour lui-même et celle qui restait en sa compagnie, afin de signaler que nulle barrière de langage n’interviendrait ici. Il revient du regard à Salome. Non. Je ne laisserai pas un petit typhon prendre ma vie. Ni la vôtre maintenant que nous sommes liés. Mû par une probable nouvelle vigueur inespérée, il renforce son pas, allégeant sa propre charge des épaules de son soutien. Son expression devient grave alors qu’il ajoute, ayant de toute évidence compris le marmonnement de la brune : J’ai moi aussi une famille à retrouver. Faisons en sorte qu’ils ne nous enterrent pas ce jour.

Ainsi et grâce à l’aide de la jeune fille, ils parvinrent éventuellement à rejoindre leur troisième amie. La détresse de cette dernière était double : une porte inexorablement fermée et un silence de mort derrière. Face à cela, Takeshi ne put que hocher la tête de droite à gauche. Il était forcément incapable de faire quoique ce soit pour les aider à passer cet obstacle… Et son sabre n’y aiderait pas. Ce n’était pas un film, il allait falloir jouer d’une toute autre inventivité.

HRP:

Parce qu'il est facile de perdre la tête dans de telles circonstances, Salome contient ses égarements en se concentrant sur les autres comme elle le fait d'habitude. La jeune femme ne manqua cependant pas le changement net de comportement de Sae envers le vieil homme qui devait assurément être un homme influent du coin ; cependant et pour l'instant, il était une personne comme une autre pour Salome. Une personne qui avait besoin d'aide. Souriant à belles dents à la japonaise face à ses remerciements, elle ne se formalisa guère d'être mise de côté dans la conversation dans la langue natale de ses deux condisciples d'infortune, concentrée sur l'instant présent. Le chien de Sae partit devant et la brune essaya de le suivre, glissant des yeux en espérant ne pas être aveuglée par les débris.

Sentant l'inconnu recouvrer un peu de ses forces, Salome lui laissa un peu de leste en le soutenant de manière moins appuyée, par politesse. Elle fut reconnaissante qu'il lui parle en anglais, et le fixant la jeune femme lui offrit un sourire conquérant. Pour sûr, il rayonnait le courage et la mesure. Pile ce qu'il fallait au groupe qui prenait initiative et risques pour s'en sortir. Ne trouvant rien à dire, Salome s'abstint de le prouver et suivit simplement le groupe jusqu'à la porte, sursautant en voyant Sae se prendre une chaussure en pleine poire.

"Oh meuf, ça va ?", lui demanda-t-elle toute inquiète.

Elle sourit en voyant Sae se reprendre immédiatement et les mener vers une porte derrière laquelle personne ne répondit. Entendant les propos de ce monsieur Matsugana, la brune se sentit toute ragaillardie et confiante. C'était bon de se soutenir de la sorte, sans férir si ce n'était pas que des mots en l'air ; mais quelque chose lui disait que le vieux pensait ce qu'il affirmait. Vérifiant qu'il puisse se tenir seul, elle le quitta pour se diriger vers la porte close, sa patiente très limité la poussant à agir de manière impulsive.

"On va essayer ghetto style, pousse toi ma puce."

Il n'y avait pas trente-six mille moyen d'entrer et on excuserait son geste car Isaac n'attendrait pas qu'ils sonnent poliment. Sous les bourrasques, Salome s'élança contre la porte, l'épaule en avant. C'était une fille solide qui n'avait pas froid aux yeux, avec pas mal de force physique. Et bien qu'elle agissait sur un coup de sang, rebondissant sur la porte pour à peine la faire bouger un peu, elle se jeta à nouveau contre cette dernière de toutes ses forces, car leurs vies pouvaient en dépendre et elle le savait. Son épaule la fit souffrir, mais elle s'y reprit une dernière fois, plus brutalement.

"Oy-yoy-yoy !... tu vas t'ouvrir, bordel à queue de shiksa de porte ! Oy vey !"

HRP:

La porte a beau gémir et grincer sous les coups, elle n’en reste pas moins solide et obstinément close. Cependant, une personne à l’oreille suffisamment attentive pour occulter les sifflements du vent peut entendre à l’intérieur comme un bruit de pas qui se rapproche. Après quelques secondes, une voix retentit, rocailleuse et peu amène, suffisamment forte pour couvrir momentanément les sons de l'ouragan. « Allez-vous-en ! Y’a rien pour vous, ici ! On peut pas vous aider ! Si j’ouvre, je tire ! » libre à vous d’insister afin de voir si la menace est réelle, mais la voix qui vient de vous mettre en garde semble tout à fait sérieuse et décidée.