Chapitre 2 : La Corporation
Decay
Decay, destination de tous les possibles, terre en friche où fourmillent les possibilités et l'argent facile, où chaque vice est accessible, chaque désir libre d'être comblé. L'île prospère, se vautre dans sa propre réussite, quand l'ouragan Isaac survint, balayant sur son passage les installations des gangs comme leurs prétentions. Et un nouveau groupe émerge des brisures laissées par la tempête, la Corporation. Forte de son budget, celle-ci s'invite en sauveuse, promet à tous une aide financière et humaine, des avancées conséquentes, pour une vie meilleure. Avides de pouvoir ou simples fantoches, qui sont vraiment les acteurs de cette entité inédite qui prétend étendre son influence à tout Decay.
11/10/2020 HRP
La Newsletter est sortie ! Beaucoup de changements au programme, par ici
11/10/2020 RP
Quelques semaines après la fin de l'ouragan, la Corporation dévoile son visage ! A lire par ici
12/09/2020 RP
L'ouragan Isaac s'abat sur l'île ! Pour en savoir plus, par ici
12/09/2020 HRP
L'event Hurricane est lancé ! Vous pouvez toujours le rejoindre par ici.
27/08/2020 HRP
Nouvelle newsletter ! La lire ici.
05/07/2020 HRP
Nouvelle newsletter et nombreux changements ! La lire ici.
30/05/2020 HRP
Nouvelle newsletter en cette fin de mai ! La lire ici.
30/05/2020 RP
Un nouveau système de réalité augmentée sort au Space Station Bar ! Participer ici
5/04/2020 RP
Le Carnaval de Napoli est lancé ! Extravaganza
8/04/2020 HRP
Nouvelle newsletter ! La lire ici.
18/03/2020 HRP
Ajout des missions et petite update de l'index !
28/02/2020 HRP
Deuxième newsletter ! La lire ici.
28/02/2020 RP
La Milice redouble de violence et est plus présente sur le territoire de Decay !
31/01/2020 HRP
Première Newsletter, bébé forum deviendra grand ! La lire ici.
31/01/2020 RP
L'intrigue "Paranoïa" a été lancée ! Par ici.
17/01/2020 HRP
Ouverture du forum ! N'hésitez pas à rejoindre le Discord !
Il parait qu'une jeune fille a été aperçue allant dans les égouts. Depuis, elle n'a plus donné aucune nouvelle d'elle. Une nouvelle victime des monstres vivant dans les égouts ?Une vingtaine de serpents en liberté auraient été aperçus sur les Docks. La Triade en sueur.On déplorerait trois morts suite au dernier barathon de la rue de la soif.À Kabukicho, des rumeurs sur l'affaiblissement des effectifs du clan Oni commencent à poindre. L'absence de Yokai se fait-elle enfin ressentir ou cela n'est-il que le fruit de l'imagination de quelques résidents ?Une certaine Shrimpette serait en train d'écrire une fan-fiction sur certains membres de Decay.On dit que l'ensemble du corps d'un certain mercenaire travaillant pour la Triade serait entièrement recouverts de ses nombreux crimes. Une dizaine de cadavres auraient été découverts, au cours du mois de Janvier, sur les Docks. Certains évoquent un règlement de comptes. Un tout nouveau malware parcourrait la toile, déguisé sous la forme d'un logiciel à première vue inoffensif. Il installerait une backdoor sur les machines infectées. Pour quelle raison ? Cela reste un mystère. Une femme vagabonde à la chevelure d'un noir profond et aux yeux écarlates prendrait en charge des malades et blessés au travers de Decay pour une misère, offrant une alternative médicale à celle dispensée par l'Église. Fin Janvier/Début Février, une course de rue, en pleine nuit, aurait conduit certains hommes hors des pistes. Plusieurs voitures seraient sorties de la route suite à un « conducteur fantôme ».
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Les ruelles sont désertes, et seule la lune dispense sa clarté froide qui ne chasse pas l’obscurité grandissante. Le vent mugit, s’engouffre entre les hauts murs des bâtiments délabrés qui composent la majorité du paysage morne qui s’étend devant les yeux du russe. L’air glacial s’infiltre sous ses vêtements, le fait frissonner alors qu’il observe avec attention la petite silhouette qui s’avance, inconsciente sûrement de sa présence. Certainement un dealer. Une vermine qu’il a en horreur.

Dans les mains aux articulations écorchées, le manche du couteau danse, virevolte comme un animal doué de vie propre. Dimka n’a pas la moindre goutte d’alcool dans le sang, et ce simple fait suffit à le mettre d’une humeur de chien. Il se met en mouvement, suit silencieusement la silhouette, se glisse dans ses pas à la manière d’un grand fauve en chasse. Bientôt, songe-t-il sans cesser de jouer avec son arme, un sourire mauvais lui étirant les lèvres.

Moskva compte nombre de résidus humains tout juste bons à être écorchés, puis balancés à la flotte. Ou livrés, une fois délestés de leurs organes, au marché des docks. Le sourire grandit, s’étend sur ses lèvres, sauvage, confère au visage partiellement mangé par les mèches blanches qui volent à chacun de ses pas  une aura malsaine.

Il presse le pas, change de trajectoire, connait ces rues par cœur, chaque raccourci, chaque recoin susceptible d’abriter misère ou bon plan, gagne bientôt l’intersection qui lui permettra de couper tout net la route à sa proie. Il apparaît à deux mètres d’elle, débouche d’un coup en misant sur la surprise pour l’arrêter, en apprendre davantage avant de simplement la tuer. Decay aime les surprises, jeter sur la route des uns le destin des autres, et Dimka ne se lasse pas des imprévus que sa ville bien-aimée ne cesse de lui offrir.

Il s’immobilise, relève légèrement la tête après avoir dégagé ses traits des cheveux qui gênent sa vision, jauge rapidement la silhouette qui lui fait maintenant face avant d’esquisser un nouveau sourire. Désaxé. Malgré le froid, il ne porte qu'une veste en cuir légère, un pantalon troué, et l'étui de l'arme qui pend à sa hanche.

« Qu’est-ce qu’on a là. Des embrouilles, sans aucun doute. Et qu’est-ce que ça fait ici ? Drogue ? Des conneries du genre ? Tu bosses pour qui ? Balance. On a pas toute la nuit. » Le couteau est dans ses mains, bien visible entre les doigts tatoués. Il n’est pas vraiment menaçant, encore. Juste inquiétant. Et à mesure qu’il observe celle qui se tient non loin de lui, qu’il prend note de la taille, de la corpulence, le soupçon qui lui vient lui tire un éclat de rire sec et incrédule.

« Une meuf en plus ? J’ai gagné ma soirée on dirait. Bon, qu’est-ce que tu fous là ? Si t’essayes d’te tirer tu prends la lame dans l’dos. Si tu m’attaques de front tu la manges entre les côtes. Tu traînes toute seule, alors tu dois savoir t’démerder au moins un minimum, sinon tu serais morte. Tu viens souvent ici pour refourguer tes merdes ? »

Il recule d’un pas sans la lâcher des yeux, s’adosse tranquillement au mur le plus proche pour continuer de l’observer à son aise. Il s’humecte les lèvres, regrette encore une fois de ne pas s’être mis une murge avant de sortir, et reporte son attention sur la nana, du moins le peu qu’il peut en voir. Peut-être que c’est un mec après tout, pour ce qu’il en discerne, bien que la carrure ne colle pas. Ça ne fait aucune différence, de toute façon. Ce soir, Moskva lui appartient. Et il n’a aucune envie de partager.
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C’était une nuit comme les autres étrangement. Elle n’avait pas froid, vu qu’elle passait sa vie dehors, une capuche sur la tête et tout allait pour le mieux,  la force de l’habitude. Elle n’était même plus prudente ou attentive à ses arrières, voilà dix ans au moins que la fille arpentait ces rues pour des raisons diverses. Une fois sur quatre, en chemin, opportuniste à souhait, elle se débarrassait de sa came certes, mais majoritairement, elle passait dans le coin pour rendre visite à son frère Tolia, avant sa mort à Mika’ aussi accessoirement. Comme cette fois. C’était rare que cette créature puisse marcher la conscience tranquille, d’ordinaire, elle était toujours dans une combine valable pour être accusée avec raison. Toujours en dèche de tune celle-là. Ce soir-là par contre…

Putain pour une fois qu’elle était clean.

Machinalement, la brune s’était arrêtée, vu qu’elle était dans la lune jusque là  l’imprudente, il l’avait presque fait sursauter -elle avait carrément bondi sur place en fait quand il était sorti de nulle part. Par habitude, avant d’ouvrir son clapet, elle scrutait le bonhomme venu l’intercepter, surtout ici, dans l’obscurité comme ça, pas facile de le distinguer, mais son accent fusillé avait bercé ses oreilles. Un russe, la brune avait eu son lot de déboires et franches rigolades aussi avec ces spécimens-là. De toute façon elle avait bien repéré le reflet de la lame, autant dire que la priorité se tenait sûrement là pour le moment. Déjà faite planter une fois, ça lui suffisait comme expérience. Puis le voilà qui se foutait de sa gueule ouvertement. Ok il avait fini de la gonfler de ce connard. Ellone jetait sa capuche en arrière, tant qu’à faire, qu’il profite de son joli minois. Le seul truc féminin chez elle ceci dit. Peut-être sa voix aussi.

“ T’es tendu priyatel’ tu sais, ce n’est pas bon pour ta santé. Tu vas blanchir encore plus que tu l’es déjà. “

Le petit mot russe qui faisait bien. Fermer sa gueule, ça allait un temps. Elle était encore sage pour le moment en plus. Pour le moment. Puis les manières, la politesse et Ellone, ça avait toujours fait soixante milles. Cette fille s’en foutait de tout, forcément ça l’aidait à paraître à son aise. Même s’il ne lui donnait pourtant pas en réalité l’envie de faire la fière.  La voilà qui écartait et levait les bras, son parka s’ouvrait pour le coup laissant voir son intérieur, mal sapé, mais pas armée. Inoffensive pour autant ? Qui sait. Plus le temps passait, moins elle pouvait cacher féminine de toute façon. Autant en jouer en mimant la chose chétive. Il avait raison sur un point, si elle avait survécu aussi longtemps, c’était qu’elle savait toujours quand saisir son moment. Par contre, trop curieux à son goût, un tri allait s’opérer dans ses questions/réponses.

“ J’ai de quoi consommer si c’est ce que t’es venu me racketter. “

Un geste lent, elle lui montrait du bout de deux doigts en le tirant, le sachet objet visiblement de tous les tourments. Clin d’oeil lorsqu’elle avait capté son attention. Elle aussi, elle aimait se foutre de la gueule des gens. Ce n’était pas le premier, ça ne serait pas le dernier venu la menacer ou la braquer. Ou peut-être si en fait si la tuait. Comme si dans cette chienne de vie elle pourrait avoir droit à un raccourci.

“ Tu ne viens pas vérifier ? “

Sourire de toutes ses dents. La fille n’avait l’air de rien, pourtant ses dents étaient impeccablement blanches, Ellone et ses priorités, c’était tout un roman. Elle souriait plus pour l’emmerder qu’autre chose ceci.

“ Apparemment, je venais te voir, c’était juste que je ne le savais pas encore avant de te croiser... “

Cette fois elle lui faisait profiter de ses talents linguistiques, c’était plus un hybride ukrainien russe qu’un ruskof franc, mais c’était le vocabulaire auquel Mikael l’avait habitué. D'ordinaire, ça lui suffisait comme pirouette pour calmer les buveurs de vodka. Au pire son genou dans les burnes aussi était efficace. Elle gardait les mains en l’air, mais avec son petit rictus étiré dans un coin, ça lui donnait plus une tête à gifles qu’un air innocent en fait...

Dire que ce gars-là ne lui était pas si inconnu que ça.
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La première réplique tranche le silence qui s’est glissé entre eux, tire au russe une grimace amusée. Grimace qui se transforme en rictus lorsque le visage qu’il aperçoit dans la pénombre lui fait froncer les sourcils, l’intrigue. Il connait ces traits, les a déjà croisés auparavant. Où ? Quand ? Il n’a pas de certitude, seulement un doute qui enfle à mesure que les secondes passent.

Un haussement de sourcil accueille l’aveu, sans qu’il ne quitte sa position contre le mur, l’appui inconfortable lui permettant de protéger ses arrières. Il glisse une main dans la poche de son jean, sans répondre, en tire un paquet de cigarettes écrasé, en plante une entre ses lèvres avant de l’allumer en portant ses mains en coupe autour de la flamme rachitique qu’il extirpe d’un briquet en plastique.

« Ce serait pas la frangine de Mika ? » lâche-t-il après avoir aspiré une bouffée généreuse qu’il recrache en même temps que la question. La voix toujours traînante, éraillée, l'accent épais et malhabile lorsqu'il s'agit de causer anglais. Son regard se porte sur le paquet brandi, et il secoue légèrement la tête avec un dégoût évident. « Range moi ça, j’en ai plein l’cul des dealers du dimanche. Tu vaux mieux qu’ça, nan ? Ton frère t’as rien appris ? »

Il soupire, aspire une nouvelle taffe avant de laisser la clope tomber au sol. Il l’écrase d’un coup de talon, s’avance vers la fille, et lui colle les mains sur les épaules, à la fois pour l’empêcher de se tirer, et pour pouvoir mieux la regarder. « Lenna, c’est ça ? » Il la scrute, resserre légèrement les doigts sur les épaules frêles avant de la lâcher complètement.

« Débrouillarde, sinon tu serais morte. Mais imprudente. Tu peux pas t’permettre d’ouvrir ta jolie petite gueule comme ça, pas sans savoir qui s’trouve en face de toi. J’ramasse des tarés tous les soirs quand j’traîne. J’leur démolis la gueule, mais j’peux pas tous les buter. Ça foutrait l’bordel. Tu sais comment ça marche, ici. Le chaos règne. » Il hausse les épaules, repêche une clope et l’allume comme l’autre, la fumée lui glissant des lèvres lorsqu’il reprend la parole.

« On va s’caler l’cul ailleurs vu qu’visiblement j’aurais pas besoin d’me battre ce soir. Sauf si tu veux pas m’suivre. Mais j’te donne pas gagnante dans un combat, même sans arme. » Un nouveau sourire lui remonte les commissures, tranche l’obscurité comme une vilaine balafre. Le couteau regagne l’étui dans un geste fluide, alors que le russe se détourne de la fille, la clope toujours au bec, l’esprit empli de nouvelles questions. Il ne l’a pas croisée depuis un bail, depuis la mort de son frère, s’il se souvient bien.

La disparition de ce dernier avait délié les langues à l’époque, sans qu’il n’ait jamais cherché le fin mot de l’histoire. Une idée, de creuser par là, songe-t-il en avançant dans la ruelle sans vérifier si elle le suit ou pas. « C’est pas une question, amène-toi. » Un foutu chat sauvage. L’image lui tire un petit rire et il continue d’avancer, visualisant déjà mentalement l’itinéraire à suivre pour lui bloquer de nouveau la route si jamais l’envie lui prend de le fuir.

La rue de la soif n’est pas un coin idéal pour avoir une conversation privée, trop de monde, de lumières, d’agitation, et il opte plutôt pour un bar paumé dans une rue adjacente, s’y engouffre comme un spectre, haute silhouette accompagnée par les murmures du vent. Il s’arrête devant l’entrée miteuse qui promet aux éventuels clients des cocktails explosifs, renifle devant l’état de décrépitude avancée du bâtiment, et termine tranquillement sa clope pour voir si le chaton a fini par lui emboîter le pas ou pas. Minou minou, se retient-il de claquer dans la nuit, un nouveau sourire lui montant aux lèvres. Sacrées bonnes femmes. Toujours le chic pour se mettre dans des situations invraisemblables.
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Pendant ce temps dans une autre partie de Decay, tu es en position latéral de sécurité mental à cause d'un mercenaire mécontent. Pour assurer un peu tes arrière tu préfère prévenir quelqu'un que les choses ne se passe pas comme prévu. Cette personne Ellone qui te semble la plus approprié... Lucky aurait pu être une option aussi étant donné son lien de proximité avec Red. Tu sais qu'au pire elle préviendra elle-même Lucky si jamais. Le téléphone d'Ellone vibre donc dans sa poche quelques seconde après l'envoi du message.

9:41 AM
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   Je suis avec le mercenaire il a pas l'air ravie, du coup je suis un peu obligée de le suivre, là. Si je te recontacte pas tu pourras buter quelqu'un lol
   -->
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Bonne pioche, il avait l’air de plutôt bien le prendre. Un jour, cette fille s’étouffera avec sa chance. Perplexe ceci dit devant la scène que lui offrait le personnage, pourquoi c’était aussi simple que ça ?

La réponse qui allait venir n’allait pas lui plaire en fait.

“ Effectivement.”

Le ton malicieux avait foutu le camp, instantanément, l’évocation de son frère lui avait passé le goût de faire la folle-pour le moment. Sujet sensible, limite tabou. La fille n’avait toujours pas digéré l’accident et avec lui, toute sa vie qui avait éclatée en morceaux.  Autant dire qu’il venait d’additionner en un coup absolument tout ce qui lui faisait mal. Puis voilà en prime qu’elle calculait enfin avec qui elle était en train de discuter. Toujours aussi charmant celui-là, de base elle l’avait toujours bien aimé pourtant.  Un soupir lourd lui échappait alors, Ellone n’aimait pas trop qu’on la touche, voir, pas du tout ça en fait, mais bon elle essayait de se convaincre qu’il pouvait se le permettre vu son antériorité. Elle s’en sortait plutôt à bon compte en regardant de plus près.

Avec Mika, elle aurait déjà mangé une tarte depuis longtemps pour sa façon d’agir, et ça la perturbait d’y repenser.  Voilà longtemps qu’elle ne s’était plus soucié des conséquences de ses actes. Elle se perdait alors un instant dans le reflet vermillon qui lui offrait en réalisant pourquoi elle ne s’approchait plus des connaissances de Mika. Profil bas sur le reste des tirades, même si ça la faisait chier, il disait cruellement vrai - encore une fois. Y avait toujours le coup de pied dans les burnes pour s’esquiver, mais pas le courage suffisant de le tenter. Étrangement.

“ Wouah, quelle mémoire, ça fait un bail quand même. “

Deux ans au moins. Y avait vraiment que quelques personnes qui l’appelaient comme ça. Pour le reste elle roulait des yeux. Elle aurait bien plaqué sa main contre sa bouche pour le faire taire, mais sa réserve d’antan écrasait sa désinvolture permanente. Sûrement cette histoire de respect que son frère lui avait appris, comme quoi, elle avait retenu quelques chose. Ellone faisait quand même un peu la moue en repensant à la situation sans issue.  Voilà qui était embêtant, surement pourquoi elle s’était plongée sur un autre problème qui la faisait souffler d’agacement: être traité comme une enfant.

“ Hey lâches moi un peu ! Je n’ai plus dix ans depuis longtemps au cas où t’as pas remarqué. Je n’ai pas besoin de chaperon. Ni de moral. “

Pourtant elle suivait sagement, sûrement par une habitude restée de leur connaissance commune. Ah bah si le plan s’était picolé, il aurait dû le dire tout de suite, gain de temps. C’était son loisir favori, Mika n’avait pas fini de se retourner dans sa tombe, sa petite soeur chérie additionnait toutes ces choses à ne pas faire. Quand elle tournait la tête pour signifier son approbation pour le lieu d’ancrage, Ellone se retrouvait nez à nez avec ce sourire qui ne lui inspirait rien de bon. Moqueur à souhait, son regard plissait sous la constatation.

“ Une grande fille Dimka. “

Sourcils froissés, la brune décidait de le lui rappeler encore une fois. Une tête au moins de plus qu’elle et quatre fois plus large, ça l’aidait pas à paraître crédible, mais bon.

“ Crois pas que je vais gentiment me contenter d’une bière. “

On dirait bien que finalement, l’évocation de son frère l’avait mise  plus à l’aise qu’il n’avait paru de prime abord. C’était d’ailleurs son tour de le traîner à l’intérieur du bar en ouvrant la marche  et sans surprise, elle avait opté pour la zone la moins encombrée. Elle n’aimait pas beaucoup la foule, ni le bruit. Pour la consommation, elle se contenterait de ce qu’il y avait.  Au moins un truc sur quoi elle n’était pas difficile.

“ Donc… c’est quoi  le plan pour ce soir ?   “

Son coude était posé sur la table, une de ses joues était écrasée dans sa main. S’il l’avait amené là pour lui faire la morale, la soirée n’allait pas faire long feu. C’était le bon moment sous la lumière pour l’observer de plus près. Le même à quelques balafres près. Autant dans le look que le comportement.

“ T’en es rendu à racketter les gens dans la rue ?  Ou t’étais juste en quête de quelqu’un à emmerder ?  ‘Fin… Je ne vais pas me plaindre que tu te sois souvenu de moi ceci dit, ou même reconnue en fait. “

Voilà qui lui avait évité des problèmes.  Être la petite sœur de Mika l’avait toujours préservé de beaucoup de choses. Jusqu’à ce qu’elle arriverait à la fois de trop. Son téléphone avait vibré, mais comme toujours, elle n'allait pas se jeter dessus. Peut-être qu'elle aurait dû...
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Sale gamine. Elle avait bien poussé en deux ans, et était toujours en vie. Voilà qui aurait dû enchanter son frère dans l’au-delà d’où il la guettait peut-être. Il secoue la tête, repousse les images d’autres frères disparus dans d’autres circonstances. Saloperie de vie. Saloperie de ville. Il renifle, préfère se focaliser sur la silhouette qui le rejoint.

« Jamais à cours de jérémiades on dirait. J’suis une grande fille Dimka. » Souffle-t-il avant de la suivre à l’intérieur, un œil rivé sur son dos alors qu’il prend rapidement la température de la pièce. Non, ils ne seront pas dérangés ici. De rares clients sont massés dans le coin le plus chaud de la salle principale, et un barman à l’air endormi essuie lentement ses verres à l’aide d’un torchon graisseux maculé de taches suspectes. Un vrai petit paradis. Le russe réprime un frisson, s’installe à la suite d’Ellone en se laissant sur une chaise avant de se remettre à la scruter. Regard acéré qui note chaque détail visible, s’applique à ôter des traits féminins le poids poussiéreux des souvenirs.

Elle ne ressemble pas vraiment à ce dont il se rappelle de Mika, mais la génétique joue parfois des tours pendables au physique des uns et des autres, et il ne s’arrête pas à cette constatation somme toute peu importante. Reprend plutôt le fil de la conversation, abandonné le temps de son examen, pour rétorquer en la gratifiant d’un sourire de loup, crocs découverts brillant dans les lumières tamisées du bar

« Change de ton chérie. T’es pas avec tes potes de la zone. » Il cache l’intérêt qu’il lui porte derrière une moue ennuyée, étouffe un bâillement avant d’étendre ses jambes sous la table, cherchant une position plus confortable. La chaleur relative du lieu lui fait du bien après la morsure glaciale de l’extérieur, et lorsque le barman vient prendre leur commande, il prend tout son temps pour réclamer deux vodkas et un verre d’eau citronnée. L’homme repart, les rend à leur tête à tête et Dimka reporte son attention sur la jeune femme, l’air grave cette fois.

« Le plan est simple. Tu m’dis pour qui tu bosses. Pas pour nous on dirait. Pas pour moi en tout cas. J’sais pas dans quelles histoires tu traînes Lenna, et ça m’intéresse pas, on a tous nos trucs. Mais là, c’est chez moi qu’tu trimballes des saloperies, et ça c’est pas acceptable. T’as d’la chance d’avoir eu un frangin qu’en avait quelque chose à foutre de ta gueule, sinon j’te garantis qu’c’est pas sur une chaise de bar qu’tu serais assise ce soir. »

Il se tait, la contemple un moment encore, tout en piochant machinalement une clope dans son paquet, et poursuit après un petit silence. « J’sais pas à quoi tu joues, mais j’ai pas envie d’te retrouver un matin, la gueule éclatée contre un trottoir. C’est c’qui t’pends au nez. J’ai pas bien connu ton frère, mais il avait l’air d’un type bien. » Il s’interrompt quand leurs boissons arrivent, chasse le mec qui s’attarde d’un coup d’œil appuyé qui l’accompagne jusqu’à son retour derrière le comptoir, attrape l’un des verres en poussant le second devant elle.

« J’rackette personne, j’purge mes rues de toute la merde qui s’y accumule. » Haussement d’épaules, regard inquisiteur, une lampée gourmande et le contenu du verre disparait avant qu’il ne le repose sèchement pour faire signe au proprio d’amener la bouteille. L’alcool lui brûle la gorge, lui arrache un soupir satisfait. « Lenna. Quel âge maintenant ? Passé celui des gamineries en tout cas. » note-t-il avec une ombre de sourire. Encore une qu’il n’a pas envie de voir atterrir dans son arène ou dans ses cages.

Chose qu’il s’abstient de lui signaler d’ailleurs, peu désireux de la braquer davantage. Les bestioles acculées ont parfois de drôles de réactions. Et les coups de griffe lancent affreusement, il en a déjà fait la sale expérience. « Picole pas trop j’ai pas envie d’te porter. » souligne-t-il encore avant de se resservir avec entrain, décidé à se coller une mine histoire de se rendre la soirée plus douce.
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Effectivement, soudain d’un détail revenait sur la table. C’était sa zone visiblement. Oups? Elle n’allait pas se démonter pour autant, son petit sourire en coin se dessinait, bon s’il fallait en passer par là, ça serait un début comme un autre. Ce n’était pas la première fois - ni la dernière, qu’elle se mettrait dans un guêpier de ce genre. Le pire dans tout ça étant que ça ne la troublait pas vraiment, pas qu’elle ignorait ce qu’elle risquait ou était sûre d’en échapper… juste qu’elle s’en foutait. De ça, comme tout le reste. On aurait dit qu’elle laissait juste le temps s’écouler, les choses se faire, spectatrice  blasée de sa propre vie. Parfois, ça pouvait être pratique, d'autres fois très pénalisant.

Toujours affalée d’un bras sur la table, elle l’écoutait sagement en  ponctuant souvent les fins de phrases du gars d’un mouvement de sourcil plus ou moins réactif. Elle s'intéressait plus à l'examen de la différence des nuances entre ses yeux que de ce qu’il lui racontait, mais le principal restait qu’elle avait écouté à peu près ce qui lui avait semblé être le plus pertinent. Elle connaissait la musique par coeur de toute façon.

À un moment un blanc s'installait, son sourire s'accentuait,  elle était suspendue à ses lèvres on dirait. Il était pourtant en train de la saouler. Il finirait par cracher sa pilule tôt ou tard, donc son mal était pris en patience. C’était qu’il avait les crocs longs le garçon, littéralement d’ailleurs.  Puis tandis qu’il lui faisait la morale - encore, elle cherchait l’utilité à se les limer de cette façon. Quelques instants, ses pensées se trahissaient sur une bouche légèrement entrouverte  alors qu’elle pressait sa langue sur une de ses canines pour tester l’effet.  Puis la moue que ça lui faisait en passant…  Merde, en réalisant qu’elle s’était trop laissé déconcentrer par ce détail, Ellone lui affichait un air coupable, avant de tenter de regagner du sérieux.  Fallait faire genre qu’elle avait suivi maintenant.

“ oops… Je ne le referais plus, ça te va ? “

Son petit doigt lui murmurait que non, avec son instinct l’ayant gardé en vie jusqu’ici, Ellone savait qu’elle avait intérêt à lui  détailler plus que ses pseudo excuses. Faudrait surtout pas lui donner envie de plus creuser la question; un soupire las lui échappait tandis qu’elle se débarrassait de sa veste, histoire de ne pas attraper froid en sortant. Puis réquisition d’un verre qui lui était si gentiment offert.

“ Je me débrouille seulement  pour me faire de la tune comme je peux. Parfois je prends de mauvais bails comme ce soir chez toi. Mettons ça sur le compte de mon ignorance d’accord ? “

Ses petits airs innocents, elle ne les faisait pas souvent, de toute façon, ils ne pouvaient jamais durer longtemps, car chasser le naturel et il reviendra au galop.

" Y a pas à s’en faire pour ma p’tite gueule, je sais la préserver.  “ En passant, elle le gratifiait affectueusement d’un doigt d’honneur pour sa remarque, sans prendre la peine de répondre à la question principale. “ L'âge c’est relatif comme donnée. Y a vraiment une limite  pour les gamineries tu penses ? Après ça on doit rester sérieux tout le temps c’est ça ? Quel ennui. “ Elle avait encore le goût de rire, mais pas pour longtemps.  Une nouvelle fois, ses yeux roulaient sur la dernière remarque. “J’aimerais bien voir ça. “

Elle se moquait bien évidemment. Ce n’était pas comme si elle avait attendu après lui pour se saouler comme une grande. Puis cette fille avait tendance à faire tout ce qu’on lui disait de ne pas faire. La pédagogie de Dimka était de toute évidence à revoir entièrement.

“ Moi par contre,  je t’abandonne sur place après t'avoir tiré ton porte-feuille, t'es prévenu. “

C’était si gentiment dit avec son petit sourire de connasse. Non mais, il croyait quoi celui-là. Bien sûr qu’elle allait lui vampiriser sa bouteille, même si la vodka n’était pas son alcool préféré, son humeur était toujours meilleure une fois imbibée. Encore un truc que son frère ne lui aurait pas laissé faire. Autre problème, faire la conversation n’était pas vraiment son fort. Voilà pourquoi elle tirait son tel de sa poche, le pianotait quelques secondes pour le déverrouiller, ignorer ses quinze messages en attente en le poussant vers lui.

“ Laisse-moi ton num avant qu’on soit trop bourrés pour ça. “

Parce qu’elle, déjà, elle se resservait aussi. Quoi ? ça pourrait toujours lui servir.
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Elle ne l’écoute pas. Décroche, revient, lui accorde quelques miettes d’attention, repart. Comme s’il était aveugle. Ou trop concentré sur sa propre personne pour remarquer son manège. Mauvais calcul. Dans les yeux vairons, le temps vire à l’orage. Elle a le chic pour lui assombrir l’humeur. Et rappeler à la surface tout ce qu’il s’efforce de contenir. De garder à distance. La sobriété n’aide pas, et c’est avec empressement qu’il s’envoie deux verres d’affilée.

Lucide, il ne la supportera pas, c’est certain, et il s’en voudrait de ne l’avoir traînée ici que pour l’en faire sortir avec son pied au cul. Les répliques s’enchainent sans qu’il ne les relève, mais ses doigts pianotent maintenant nerveusement contre le bois vernis et couvert de traces de la table. Impatience. Corrosive. Il esquisse un sourire torve devant le doigt dressé, refoule son envie de le lui briser, là, comme ça, au milieu du bar, pour lui inculquer quelques notions de respect. Préfère accélérer le rythme, miser sur la boisson, une fois encore, pour s’épargner une confrontation qui ne peut que mal finir, et n’arrangera ni les affaires de la filles, ni les siennes, au fond.

« J’suis pas assez con pour m’balader avec du fric sur moi, Lenna. » commente-t-il, ton désintéresse et regard virevoltant entre elle et la précieuse bouteille. C’est là qu’il réalise. Qu’il comprend. Avec un peu de retard. Qu’elle n’a pas la moindre putain d’idée de qui il est. Et ça le fait rire, subitement, un rire silencieux, qui le secoue tout entier, qui manque presque le faire lâcher son verre. Il met une bonne minute à se calmer, recentre sur Ellone un regard encore brillant, amusé.

« Tu m’butes. » murmure-t-il à son intention avant de lécher la vodka qui s’attarde sur ses lèvres d’un coup de langue rapide. Oubliée, la mauvaise humeur, du moins pour l’heure. Son intérêt est ravivé, et il attrape le portable avec un sourire en coin. Une fois qu’il l’a entre les mains, il prend tout son temps pour fouiller le répertoire, hausse les sourcils devant certains noms, ou mots, qui n’ont pour lui aucun sens, et ouvre le dernier message reçu qu’il parcourt rapidement.

Son sourire s’étend, et lorsqu’il reporte son attention sur la fille, c’est pour lui annoncer sans montrer la moindre intention de lui rendre l’appareil. « Ouh, j’crois qu’une de tes copines a un p’tit problème. Vous fricotez avec des mercenaires en plus ? C’est pas malin malin ça. » Il regarde encore un instant les autres messages, renifle brièvement, et fini par glisser l’engin dans sa poche, tout en agitant son index sous le nez de la jeune femme

« J’te rends ça plus tard, j’ai pas super envie d’te voir appeler la cavalerie, sait-on jamais. Et si t’es pas contente, tu peux toujours essayer d’venir le prendre. » Il marque un nouveau silence, le temps de se demander ce qu’elle peut bien foutre avec des gens fréquentant des mercenaires, et s’affale un peu plus contre le dossier de sa chaise en sentant enfin les premiers effets de l’alcool ingurgité. Le froid n’est qu’un mauvais souvenir, et la tension permanente dans ses muscles s’apaise, lui donne enfin un peu de répit.

« J’te filerai mon num plus tard. Quant à tes doigts, apprends à les laisser en place, ce serait bête que tu repartes sans. J’suis pas un mec relou Lenna, tant qu’on m’chie pas littéralement dans les pompes. Et ici, l’ignorance n’a jamais été une excuse. Parce que t’es censée savoir où tu mets les pieds. T’es censée t’informer avant d’te jeter dans la gueule du loup, en espérant t’en sortir avec des excuses merdiques. C’est tout c’que ça te fait, de l’avoir perdu ? Tu veux crever comme lui ? T’as pas envie d’juste, j’sais pas, préserver un minimum c’qu’il a voulu protéger quand il était encore là ? » Le ton est calme. Posé. Dément le tranchant de chaque mot qu’il lui assène avec une précision chirurgicale. Les chiens reniflent toujours le sang. N’attendent que l’appel à la curée. Et sur un signe d’elle. Un seul. La situation entière peut basculer.
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Dommage se disait-elle en confisquant la bouteille qu’il guettait avec plus d’intérêt qu’elle. La fille n’aurait pas été contre le fait de lui tirer son blé, juste pour le plaisir de l’avoir plus que la nécessité réelle. C’était qu’elle aimait s’attirer les emmerdes et les traînait sur la longueur au fond. Puis alors qu’elle désaltérait sa gorge, du coup de l’oeil elle observa l’expression de son faciès jusque là agacé en train de changer. L’espace d’un instant, perplexe, elle levait un sourcil en cherchant dans sa mémoire à quel moment elle avait pu être drôle au point de motiver ce genre de rire.  Un qu’il tentait-mal de ne garder que pour lui, mais sa petite invitée n’était pas dupe, dans la catégorie foutage de gueule, elle trônerait sûrement aisément dans les premiers.

Un verre dans une main, son menton dans l’autre, elle lui répondait que d’une moue alors qu’il lui avouait presque dans un souffle son forfait. Le trouble naissait alors, leur échange avait été au tac au tac jusque là. Relevant plus d’un bras de fer qu’autre chose, elle ne comprenait ce qu’il y avait de drôle, s’en agaçait, s'attardait avec une importance déraisonnable, c’était que pour riposter, elle aurait besoin de savoir contre quoi elle se battait ? Qu’est qu’elle avait bien pu rater, d'ordinaire, pour ces choses-là du moins, quand il s’agissait de s’attirer les emmerdes, elle était plutôt vive d’esprit. Et sa confusion ne pouvait que grandir alors qu’il inspectait l’air de rien son téléphone. Étrangement, la fille ne savait plus si elle devait s’en énerver ou s’en amuser… pour dire vrai, elle n’avait rien à cacher là dedans, sinon elle ne lui aurait jamais laissé.

“ Ah ? La pauvre, elle a sonné la mauvaise cavalerie on dirait. Je n’ai pas pour habitude de m’occuper d’autre chose que mon petit cul. “

Il œuvrait, elle en profitait pour vider la bouteille, c’était qu’elle avait une sacrée descente depuis le temps…

Pour ça aussi son frère serait furieux, le russe lui avait toujours prôné l’importance de la lucidité pour gouverner les actes, mais le moralisateur ne semblait visiblement pas se formaliser sur ce point-là contrairement à tous les autres. La lucidité la fille s’en care. À vrai dire, ce monde la faisait chier, ses règles, les gens avec qui elle devait composer, comme le gars en face qui la narguait à l’aide de ses propres messages. Une énième fois, elle levait les yeux au ciel pour lui répondre, glissait ses doigts sur les parois de verre, se réservait sans même lui proposait, puis descendait ça sans aucune cérémonie. Peut-être bien qu’à force tout finirait par s'emboîter tout seul. Dans ses souvenirs, elle l’aimait bien ce gars-là, il était plus cool que ça. C’est peut-être pourquoi elle n’avait pas spécialement envie de se disputer avec, pas envie pour autant d’être traitée comme l’enfant qu’elle n’était plus depuis longtemps.

Faudrait qu’elle se fasse une raison pas vrai, on lui avait collé l’étiquette de petite soeur sur le front pas vrai ? Pour le meilleur, mais surtout le pire.

“ Le reprendre hein ? “ Sa main se levait une dernière fois, elle vidait son verre avant de se lever le teint rosé par l’alcool, mais l’esprit toujours pas embrumé. Une habituée. “ Quel genre d’invitation est-ce là Dimka ? “ Le ton n'était pas sérieux, elle se moquait un peu.

Puis le voilà reprenant son fil, sa morale dont elle se fout, rien de ce qu’il ne lui disait n’était nouveau, mais l’entendre ne changerait rien, son regard glissait entre son verre et la bouteille qui s’était tout autant vidée.  Une fois de plus, elle l’écoutait à moitié, soupirait doucement en gonflant sa poitrine pour prendre de l’air visant à la faire décompresser. C’était qu’il commençait sévèrement à la fatiguer, une fois de plus ses paupières plissaient en le fixant, tantôt ses yeux aux nuances voisines, tantôt ses lèvres qu’il n’était pas pressé de clore. L’impatience la gagnait tout autant qu’un sentiment plus profond qu’elle détestait plus que tout. La fille ne voulait pas qu’on lui parle de lui, ni qu’on lui rappelait ce qu’elle avait perdu, personne ne le saurait jamais mieux qu’elle. Finalement, elle s’irritait autant qu’elle se s’attristait, mais sur sa face de merdeuse, seule l’arrogance derrière laquelle elle se cachait transparaissait. Il se croyait donc un ami si fiable que ça pour son feu Mika’. Cette fois c’était elle qui lui donnerait la leçon. Son sourire en coin, elle avait feint de ne pas avoir écouté, pourtant, chaque tranchant de mot avait cisaillé son coeur avec brio, dans la dureté que le monde lui avait forgée, la petite brune se redressait, se levait, contournait cette table sans perdre un instant l’expression qu’il lui affichait à cet instant, lui affalé sur sa chaise.  À son niveau son rictus s’accentuait, mais le regard lui était mauvais acteur, il ne pouvait que se durcir alors qu’avec aise, elle posait ses fesses sur les cuisses du voleur de téléphone. Il avait décidé de la saouler dans tous les sens du terme et elle avait choisi de l’ignorer en ne jouant le jeu qu’à moitié.

“ Si on parlait plus du présent que du passé hein. Et toi qu’est-ce que tu m'apprendras à l’issue de cette soirée hum ? “

Sa main se glissait en arrière, la fille n’avait pas choisi le côté où se posait par hasard; le plus propice pour fouiller la poche contenant son bien et sans demander de permission, parce que ce n’était pas son genre, elle allait le rechercher comme il lui avait suggéré après tout.  Se faisant, elle calait ses yeux dans ceux du russe pour lui dire le fond de sa pensée au final…

“ Je t’aime bien Dimka, mais tu saoules. J’ai toujours préféré les actes aux mots tu sais. Du concret, comme venir reprendre mon tél sans préavis. “

Cette fois, son espièglerie la rattrapait, lui jouait défaut tandis qu’elle provoquait un gourou quand elle aurait juste pu reprendre son bien et se sortir de là. Une vérité étant absolue avec cette fille-là : Les emmerdes, elle n’y résisterait jamais...


Dernière édition par Ellone Leonhart le Mer 24 Juin - 1:05, édité 1 fois
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Il la fixe toujours, étalé sur sa chaise, les bienfaits de l’alcool se répandant tranquillement dans son organisme. Les mimiques qu’elle dessine le font sourire de plus belle, sans qu’il ne se décide à lui offrir le moindre complément d’information le concernant. Il n’a pas l’habitude d’agresser les gens sans raison, et si la trouver là avec sa drogue de merde lui a d’abord donné envie de la coucher d’un coup bien placé, l’amusement a pris le dessus sur le ressentiment.

Il renifle devant l’aveu, jette un coup d’œil au téléphone confisqué, et hoche lentement la tête. « Tu vas finir bourrée avant moi à c’rythme. » commente-t-il en admirant la descente. Il ricane devant la question, hausse vaguement les épaules, et se sert un nouveau verre à son tour qu’il s’envoie cul sec avant de rétorquer « A toi d’voir. »

Il la teste, bien que sa propre saillie n’ait pas eu pour but originel de l’inciter à quoi que ce soit. Elle a l’air emmerdée, mais toujours aussi sûre d’elle, et il n’a pas d’autre envie que d’effacer de son visage cet air suffisant qu’elle arbore. Peut-être que lui parler de son frère n’était pas la chose à faire, mais il s’en moque, pour ce que ça signifie vraiment le concernant. La morale n’est qu’une donnée vague qu’il jette parfois en pâture à ses hommes, les regardant ensuite se démener avec le concept.

« J’ai pas d’leçon à t’donner, et c’pas c’que j’essaye de faire. C’juste pour dire que les déchets qui viennent dealer sur mon territoire sans y être invités, j’les bute en temps normal. Toi, ça m’emmerderait d’devoir le faire. Tu captes ? » Il a la voix doucereuse, le timbre alourdi par l’alcool, se contente maintenant que les choses sont posées d’asseoir un fait, qui flotte entre eux jusqu’à ce qu’elle se lève. Il la regarde faire, sourcils froncés, avant d’ouvrir la bouche lorsqu’elle l’utilise comme nouveau fauteuil.

« Ça va ? J’te dérange pas trop ? » jette-t-il en plantant son regard dans le sien. Elle le fatigue autant qu’elle l’excite avec son manège à deux balles, et il n’a pas encore assez bu pour s’éviter un début de trique. « Putain tu fais chier. » gronde-t-il sans pour autant la dégager, la laissant lui fouiller les poches autant qu’elle le veut.

Il lui colle toutefois les mains sur les hanches, histoire de l’empêcher de filer maintenant qu’elle est là, qu’elle assume un peu ses conneries, et reprend, la voix traînante et le timbre amusé. « Les mots m’emmerdent autant qu’toi, crois-moi, c’pour sauver ton joli cul que j’me fais chier à t’coller les points sur les i. Tu crois qu’j’ai que ça à branler ? Ça fait un bail qu’on s’est pas croisés. Et t’as sûrement loupé quelques infos capitales. Laisse-moi t’éclairer. »

Il se penche vers elle, inspire profondément les notes épicées du parfum de la jeune femme, avant de relever la tête pour la confronter de nouveau « Tu m’chauffes, tu m’chauffes, mais au final, t’as que d’la gueule j’me trompe ? » lui souffle-t-il en retrouvant un ton provocant. « T’as pas idée d’c’qui s’joue ici en c’moment putain. Tu viens d’te caler dans un sacré merdier. Et s’il faut qu’j’sois plus clair, ces rues-là dans lesquelles tu voulais écouler ta merde, ce sont mes gars qui les gèrent. Mon gang. Tu piges ? »

Il sourit, un sourire presque peiné. Marcher sur les platebandes d’autrui n’est jamais conseillé, et les russes sont connus pour agir avant de poser des questions. Finalement, elle est chanceuse d’être tombé sur lui, et pas sur un de ces hommes  qui se serait sûrement contenté de la faire disparaître, plus ou moins proprement.

Il renifle, la serre un peu plus fermement d’un bras pour récupérer son verre de l’autre, et se serre rapidement de sa main libre. « T’es une vraie p’tite merdeuse, mais j’ai pas envie qu’il t’arrive quoi qu’ce soit, en tout cas, pas sans qu’tu sois au courant de c’que tu risques. C’ma façon à moi d’le remercier, ton putain d’frère. Parce qu’il m’a rendu service, une fois, et qu’si j’en ai rien à branler d’honorer la mémoire d’qui qu’ce soit, j’lui en dois une. »

Il soupire, rapproche son verre en espérant qu’elle ne va pas le lui verser sur la gueule, et s’octroie quelques gorgées rapides avant de lui tendre. « T’en veux ? Remue pas trop, j’me tape une sale gaule, et on a un public. J’m’en voudrais d’te sauter là, comme ça, sur la table. » murmure-t-il tranquillement. Ce n’est pas une menace, juste un constat, qu’elle est libre de prendre en compte ou pas.


Dernière édition par Dimka Orlov le Mer 24 Juin - 1:46, édité 2 fois
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