Y a une couille dans le potage - Xenon

“ Ouais bien sûr mec tu peux goûter. Le premier est toujours gratuit… “

Elle avait l’impression de répéter cette rengaine toute sa vie et ça la lassait un peu de le faire. Ellone n’avait pas choisi ce métier de merde, elle le détestait, mais paradoxalement, elle y excellait. Son manager la comptait parmi ses dealers favoris parce qu’elle lui rapportait un max. Encore plus parce qu’il l’entubait profondément au passage en se faisant du fric sur son dos. C’était comme ça depuis qu’elle était enfant, mais la brune ne s’était toujours pas fait une raison. Chaque jour, elle prenait son mal en patience…

“ Eh sale pute ! Tu essaies de nous enculer ? ! “

Aussi dubitative que contrariée, la dealeuse s’était retournée pour faire face à un client visiblement mécontent. Pas le petit client vous voyez… le genre de gars qui le faisait faire son plus gros chiffre. Juste lui mettre son poing dans la gueule serait fâcheux. Prendre du temps pour le calmer ou s’expliquer allait vite la gonfler. D’un geste de la main, elle lui avait signe de se calmer, du coin de l’oeil, elle voyait que son deal en cours foutait le camp. Voilà qu’elle avait perdu une dose pour rien avec ces conneries, une vente aussi. En bonus, ce n’était pas très bon d’avoir mauvaise pub dans le milieu.

“ C’est quoi le problème ? “

Puis là, il avait explosé, traité de tous les noms, bousculé, elle s’était rendu bien évidemment et le résultat avait mal tourné inévitablement.  Heureusement qu’un junkie en manque était une vraie loque, sinon la fille aurait pu avoir de plus gros soucis, qu’elle sache se défendre ou pas. C’était aussi son genre de taper avant de discuter- calmement, aussi une fois calmé/éclaté, la fille s’était attardée sur son cas. Elle n’avait réellement aucune idée de ce que pouvait être le problème. On lui avait jeté à la face que sa daube était coupée, pire que ça avec un mauvais ingrédient, elle avait provoqué quelques morts déjà chez certains consommateurs à qui il l’avait filé pendant ses “soirées”. Et ça, c’était un gros problème, si ça remontait aux oreilles de ses patrons, elle serait la première à qui on voudrait arracher la tête. On dirait bien que son business était fini pour aujourd’hui. Sans demander son avis au client mécontent, elle lui avait réquisitionné son restant de came pour l’emmener avec elle. La fille aurait pu remonter ce problème à son manager et le laisser s’en démerder, si elle avait eu assez confiance en lui pour pas qu’il ne remette toute la faute sur elle. Non, elle irait directement aux cuisines demandaient des comptes. Voilà comment, elle s’était trouvée devant cette fille, dans un labo du Cartel. Comme ce n’était pas son genre de passer par quatre chemins, même pas merde, ou bonjour, elle lui posait l’échantillon sur la table.    

“ C’est toi qui as produit cette merde ? Plusieurs de mes clients sont morts en la consommant. Tu m’expliques ? “

Quand elle l’avait débarqué, on l’avait orienté vers elle, une petite brune asiatique. L’arcade ouverte de la dealeuse laissait présager qu’elle n’était pas de bon poil. Elle ne partirait pas sans qu’on lui donne des comptes, pas après le remue-ménage qui l’attendait sans qu’elle ne règle ça.

Aujourd'hui n'avait pas été une journée très exceptionnelle : son pullover rouge était en train de sécher chez elle, elle avait donc dû mettre le bleu, certes aussi chaud, mais qui n'avait pas les odeurs habituelles de sueur mélangée aux différents repas qu'elle avait pu avoir. Des flagrances si rassurantes, si habituelles.

Le pullover rouge était donc absent, c'était donc très mauvais signe pour cette journée qui commençait très mal.

Première minute de la journée : elle marcha dans une crotte de chien du pied droit. Une grimace, puis cinq bonnes minutes plus tard à frotter son pied contre le trottoir, elle s'était remise en route lorsqu'un pigeon lui chia sur la tête. Demi-tour, douche, elle se félicita de s'avancer toujours d'une heure pour aller aux cuisines, sans quoi elle aurait été bonne pour un retard qui l'aurait mise mal.

Enfilant le pullover bleu, elle passa en vitesse devant celui, rouge, qui séchait, eut un petit signe de tête avant d'enlever son pull et d'enfiler celui mouillé qui finirait de sécher sur elle. Si sa température corporelle était de 37°C, ça devrait être rapide, non ?

Quelques heures plus tard, vers midi, Xenon avait la goutte au nez et le teint plus blanc que blanc. Le petit vent désagréable combiné au pull mouillé avait sans doute eu raison de sa santé un peu bizarre...mais au moins, maintenant, il était sec. Après un sandwich sans goût, elle recommença une journée semblable à tant d'autre, ce qui...n'était absolument pas dérangeant. Le seul élément un peu grinçant de sa journée fut cette femme qui se ramena en face d'elle.

Honnêtement, elle eut de la chance de se moucher pile à ce moment-là, ayant enlevé le masque pour l'occasion. Voyant que la femme – qui n'avait pas l'air très contente – posait un sachet devant elle, elle enleva le casque antibruit et comprit le souci.

« La mienne ? », répéta-t-elle.

La sienne. Non, ce n'était pas possible, sa dope ne pouvait pas causer de mort, à moins que...elle sortit un bécher et sortit ses produits et une bandelette traitée pour faire une migration par chromatographie. Concentrée, elle prit le sachet pour répendre la dope dans le bécher, y plongeant la bandelette. Si elle était pure, comme c'était le cas à l'origine, les couleurs sur la bandelette devraient être au plus bas. Si c'était coupé, en revanche...et bingo.

Satisfaite de son résultat, elle sortit la bandelette et la présenta à...elle ne connaissait même pas son nom.

« Elle a été coupée. La bandelette a réagi au produit qu'on a rajouté. Pas étonnant que vous ayez eu des morts, avant ça. Jetez vos stocks ? »

Qui avait coupé la drogue, ça, ce n'était pas son problème. Le seul truc qui lui effleurait le cerveau était qu'on ne la prenne pas pour celle qui l'avait fait, pour multiplier les doses.

Agacée, mais silencieuse, Ellone l’avait laissé faire ces trucs en attendant sa réponse. On ne pourrait pas nier qu’il avait une certaine pointe de colère devant sa première réponse, mais la fille avait su réfréner son envie de cogner avant de parler. Si ça se trouvait, la chimiste n’y était vraiment pour rien, elle allait lui accorder le bénéfice du doute pour la toute bonne et simple raison, qu'elle ne pouvait pas exister sans un fournisseur.  Bon ce n’était pas vraiment elle qui les choisissait, son manager pourrait ne pas apprécier et déjà qu’elle lui devait un bras niveau pognon. La pensée la rendait plus impatiente encore.

“ Bon tu te magnes, je n’ai pas que ça à foutre. “

Tact et délicatesse… absolument son genre. Alors, comment décrire sa tronche quand son interlocutrice se contentait de lui tendre une bandelette pour seule preuve de ce qu’elle avançait. Ellone n’était pas chimiste, elle ne comprenait pas grand-chose à ces choses-là, pourtant, vu qu’elle traînait depuis son jeune âge par ici, la fille arrivait plus ou moins à savoir quand le discours était cohérent ou non. Une grimace c’était inscrite sur son visage à l’annonce du verdict. Coupée hein ?

“ Tu sais avec quoi elle a été coupée ? Ou tu peux le savoir ? “

En soi, ce n’était pas surprenant qu’elle le soit, elle-même la mélanger pour se faire du blé dans le dos du cartel en douce. Mais elle était raisonnable dans son dosage et le médoc pour vieux qu’elle utilisait pour son mélange était inoffensif. Ça fait au moins deux ans qu’elle avait ce bail et jamais aucun problème. C’était assez facile de se dire qu’un autre avait eu la même qu’elle. La question principale était de savoir qui. Elle décidait alors de poser ses fesses sur l’une de table, passer sa vie à courir partout était fatigant.

“ Écoute-moi… C’est quoi ton nom ?... ‘fin peu importe. Que ça soit pour toi, comme pour moi, avoir ce genre d’histoires fâcheuses associées à notre nom n'a rien d’une bonne chose.  Ce n’est bon ni pour nos affaires ni pour notre petit cul. “

Un long soupire lui échappait. Comme si elle avait du temps à perdre avec ça.  Pas assez d’emmerdes à régler aussi. Logiquement, si ce n’était pas la distributrice (Ellone), ni la fabricante (Xenon), il ne restait que les fournisseurs. Et les derniers étaient les managers. Autant dire que c’était difficile de tomber sur ces gars-là, les dénoncer était mal vu, les défoncer aussi ceci dit, ce n’était pas pour autant que la brunette attendrait gentiment que tout lui retombe dans la gueule.

“ Nous faut du concret pour régler ça, des preuves ce genre de trucs capable de confondre celui qu’on suspecte. Qui récupère ta came ? T’as un acheteur direct ou tu regroupes avec d’autres cuisiniers ? “

Beaucoup de questions, mais elle n’avait pas de temps à perdre, ni envie de faire de la demi-mesure.

“ Ah ouais, vu qu’on ne va pas se quitter avant que ça soit réglé. “ Elle ne lui demandait pas son avis de toute évidence… “ Tu peux m’appeler Ello’."

Xenon jeta un nouveau coup d'oeil sur la bandelette du test. Normalement, un examen attentif de celle-ci devrait lui confirmer quel était le produit qui avait coupé cette héroïne. La chose la plus probable, c'était qu'il s'agisse d'un médicament écrasé dedans et...

...Bingo, à l'endroit où la réaction devait se faire, elle se faisait. C'était du Xanax. Xenon hocha la tête, puis trempa une deuxième bandelette dans le produit qui lui permettrait d'affiner le résultat...c'était le même.

Elle restait toujours ultra calme, même si cette fille lui avait demandé de se dépêcher : après tout, là où elle bossait, il valait mieux ne pas faire foirer ce qu'elle faisait ou les conséquences pourraient être gravissimes. Si c'était du Xanax, il n'était pas étonnant que le taux de mortalité n'en devienne que plus fort. De son avis personnel, il ne faudrait pas trop tarder à rattraper cette cargaison au risque de voir la plupart de leurs clients fragiles – soit la plupart – mourir d'overdose ou, pire, attirer une attention non désirée sur le cartel.

« C'est fait. », indiqua-t-elle. Elle s'appelait donc Ello ? Était-ce un nom entier ou juste un pseudonyme ? Xenon n'eut pas le temps de s'y attarder et après tout, ce n'était pas comme si ça l'intéressait beaucoup, elle-même ayant juste pris un mot sur le tableau périodique pour se présenter au cartel.

« Ca a été coupé avec du xanax. Il n'est pas très étonnant qu'il y ait eu des morts. Je pense qu'il faudrait aller rendre visite aux clients qui ont déjà acheté ce produit pour l'échanger avec de la marchandise correcte. », dit-elle en renversant dans une poubelle à cet effet le mélange meurtrier. « Je ne fais pas tellement attention à qui prend la marchandise, mais je pense que quelqu'un vient la prendre directement. Je ne parle pas beaucoup...avec les autres. », chuchota-t-elle comme si c'était quelque chose dont elle n'était pas particulièrement fière.

Évidemment, elle se doutait que rattraper la marchandise souillée n'allait pas être aussi simple qu'un simple rappel d'oeufs ou de produits normaux. On était à Decay, le vice était plus ou moins normal, mais il ne fallait pas non plus pousser le bouchon.

C'était tout. Elle n'avait pas la moindre idée de comment arriver à retracer celui qui avait ça, même si elle avait parfaitement conscience qu'en ce moment, elle devait vraiment constituer le suspect idéal. Xenon avait conscience du danger : c'était d'ailleurs pour cela qu'elle tentait de prendre son temps et de réfléchir.

Réfléchir.

« Il n'y a pas un fichier où le cartel note quel fournisseur a pris quoi et en quel quantité ? Si ce genre de papier n'existait pas, il serait simple pour n'importe qui de revendre à son propre compte. »

Génial. Le nom du poison venant couper la drogue lui parlait évidemment, comme beaucoup de dealers, elle-même mélangé sa drogue avec un substitut en petite quantité pour se faire du fric dans l’ombre. Par contre pas toujours et avant, elle avait pris des dispositions pour se renseigner longuement sur le moins de risque possible. Ses clients étaient son gagne-pain après tout, s’il lui arrivait d’en tuer quelques-uns pour diverses raisons, dans l’absolu pour faire son chiffre et survivre, il valait mieux pour elle qu’ils restent en vie et en capacité de consommer.

“ Je vois, faire être débile ou un amateur pour faire ce genre de connerie. “

Et son interlocutrice n’avait pas le profil de la débile de service, impossible qu’une chimiste fasse une erreur de débutant pareille. La rayer des suspects ne l’enchantait pas vraiment, tout simplement parce qu’elle était sa seule piste. Voilà qui allait compliquer ses affaires. La seconde tête de Turc, peut-être même la première étant Ellone, elle ne pouvait laisser l’affaire s’ébruiter.

“ Ça serait risqué d’avoir ce genre de fichier, puis on ne nous donnera pas accès et s'expliquer pour l'obtenir risquerait de nous foutre dans la merde. “

Elle savait que parfois les membres de gang étaient un peu couillons, mais aussi, et surtout que son amie Suzi était leur secrétaire, gérant tout cela avec une organisation sans faille. Impossible qu’elle laisse traîner ça si ça existait vraiment, impossible qu’elle lui en donne l’accès aussi. Puis avait-elle réellement envie de mêler sa sucette à ça ?

“ Impossible de retracer la came, mes clients viennent sur mes checkpoints faire leurs achats, je ne sais rien d’eux, ils ne savent rien de moi. “

Une façon de dire tant pis pour eux quelque part, en réalité elle aurait pu, mais la flemme et peut-être une volonté sadique de se dire qu’ils crèveront plus vite, autant de dégénérer en moins sur son sillage. Elle les supportait de moins en moins. Et c’était en pensant à cela que la brune avait médité à tout ce que lui avait dit la cuisinière cartelienne.

“ Je ne suis pas du genre à papoter avec les gens du gang non plus t’inquiètes… Par contre, mon manager ne fait que ça de sa journée. “

Elle essayait alors de se remémorer exactement ses fonctions à celui-là. C’était souvent lui qui lui filait sa came et ses objectifs pour la journée. Grande chance qu’il devait venir la récupérer lui-même, ce grade n’était pas assez élevé à sa connaissance pour avoir plus que des dealers en larbins. Et souvent, un dealer étant aussi lui-même un junkie, mieux valait les garder éloignés du stock sans surveillance ou contrôle.

“ Un type grand, le teint basané, un oeil qui part en couille sur la droite, un peu gras, ça te dit quelque chose ? “ Son manager qu’elle décrivait. “ Ça ne me parait pas déconnant que les managers viennent faire le plein avant de nous distribuer la came. tu sais ce que ça veut dire, si ce n’est ni toi ni moi ? “

Fallait lui faire la peau. Le pointer du doigt n’aurait aucun effet, voilà longtemps qu’elles n’étaient plus dans une cour de récré. Ellone doutait fortement qu’on lui taperait sur les doigts, il allait lui reporter la faute encore une fois et ça passera à l’as. Eh bien non, pas cette fois.

“ Il t'a autant enculé que moi. Je ne sais pas depuis combien de temps t’es là, mais tu dois savoir qu’à la casa, mieux vaut faire savoir que c’est dangereux de la placer dans le cul sans invitation. On va faire parler ce fils de pute et se le faire. "

Ellone n'était pas du genre à faire dans la dentelle malheureusement...

Comme ça, sa principale idée tombait à l'eau, mais ce n'était pas pour autant qu'ils pouvaient laisser tomber l'enquête. En soit, Xenon lui aurait bien dit que ce n'était pas grave, qu'ils pouvaient attendre, mais ça n'avait pas l'air d'être l'avis de la jeune femme qui semblait être préoccupée par cette affaire de drogue. Alors, la cuisinière haussa les épaules et tenta de se rendre émotionnellement un peu plus là, présente et réactive. Peut-être que ça pourrait lui retomber dessus, en effet, s'ils ne trouvaient pas le vrai responsable de cet bêtise.

Le portrait qu'elle lui évoquait de ce fameux manager lui parlait. Elle ferma les yeux pour le visualiser et il lui dit, en effet, quelque chose, à moins que ce ne fut parce qu'elle l'avait déjà vu dans le bâtiment.

« Je crois. », marmonna-t-elle.

Mais sa retenue n'était pas de celle qui s'en voulait de faire accuser un innocent d'un triste sort et innocent, ce type ne l'était certainement pas. Xenon jeta un regard à ses fioles et sentant qu'elles bougeraient bientôt, s'occupa de tout ranger de manière à rendre le bureau le plus propre possible. Elle n'était pas ce genre de personne qui rendait un étalage en bordel, et de toute façon, chez les cuisiniers spécialisés en drogue, ce genre d'habitude néfaste conduisait au mélange de certains produits qui n'avaient lieu d'être.

« Excuse-moi, je reviens. »

Toujours avec ses gants et comme si elle avait tout le temps du monde, elle se permit de prendre les fioles et de les mettre à nettoyer un étalage plus loin. Sur sa paillasse, il ne restait pratiquement rien, elle ne fit pas la vaisselle, franchement, elle n'avait aucune idée de ce qu'on faisait subir à ses outils qui revenaient chaque jour brillant comme au premier jour.

Xenon revint, en effet, et enleva ses gants en plastique pour les mettre dans l'immense poubelle, dévoilant ses petits doigts tous fins aux ongles rongés. Un grondement sonore retentit et elle eut un vague coup d’œil vers son ventre : ah, en effet. Mais ça attendrait un peu, du coup.

« Tu veux le tuer ? Si oui, je ne le touche pas. Je suis cuisinière, pas mercenaire, il ne tiendrait qu'à moi, je l'aurais déjà dénoncé à Red. Plus que bousiller ma marchandise, il a fait du mal au cartel. », fit-elle tout doucement, comme si elles parlaient d'un simple vol d'argent, ou d'une livraison quelconque qui s'était un peu mal passée.

En soit, Xenon se fichait bien de la vie ou de la mort de ce manager (sans doute de pacotille). Ce ne serait sans doute pas la première personne qu'elle verrait mourir, encore moins la dernière. Tout cela n'avait que bien peu d'importance, c'était juste que...les cris, la défense que pouvaient avoir certaines personnes qui tenaient à leur vie, ça faisait mal aux oreilles, ça faisait du son non voulu, du son envahissant.

« Si tu y veux », dit-elle en préparation un sac, notamment avec de la corde qu'elle trouva facilement sous son atelier, « On y va, on le ligote et on le met devant le bureau de Red en mode anonyme. Si c'est lui qui l'achève, je n'aurais pas à entendre ses cris. Et avant, on l'endort, sinon il va crier pendant qu'on va le ligoter. Attends, attends, je prépare des fléchettes endormissantes. »

Elle releva la tête, s'attendant à ce qu'Ellone accepte...ou refuse carrément le plan.

Heureusement qu’Ellone était du genre patiente, surtout devant tout le cérémonial que lui offrait la cuisinière du Cartel. Si au début elle ne pipait point un mot, très rapidement devant son ennui évident et le refus de la fille en face de se presser un peu, la brune finissait par marmonner son mécontentement, affichant ainsi son caractère si charmant…

“ Surtout, prends tout ton temps.. “

Et le pompon s’en venait quand elle se ramenait vers la dealeuse avec un ventre criant famine comme si de rien n’était. Le côté risible de la situation fit ainsi perdre la montée en pression d’Ellone qui clignait des yeux lentement quelquefois pour vérifier qu’elle n’était pas en plein tripe ou truc du genre. Elle ne consommait jamais toutes ces merdes, mais sait-on jamais qu’un truc flotterait dans l’air… C’était que le discours que lui tenait la petite brunette la laissait perplexe. Red ? Qu'est-ce qu’il venait foutre là-dedans lui ? Ellone n’était pas du genre à passer par sa “hiérarchie” pour  régler ses comptes…

“ Putain, mais de quelle planète tu sors toi ?...” Lui glissait-elle en même temps qu’un paquet entamé de biscuits d’apéritifs salés qu’elle gardait dans une large poche de son manteau pour ses encas entre deux deals. “ Sers-toi, manquerait plus que tu me fasses un malaise en chemin.”

Ses yeux se levaient au ciel alors que la fille remplissait innocemment son sac. Elle n’était vraiment, mais alors vraiment pas aider dans ce gang. Toutefois, la perspective de l’attacher et l’endormir lui plaisait énormément. Y avait que la finalité du plan qui la dérangeait en réalité, pourquoi passer absolument par Red ?

“ Ouais bonne idée, commençons par le coincé et l’endormir. “

Ensuite elle n’aurait qu’à éloigner le rat de labo pour faire sa fête à son manager, voilà un plan qui la motivait davantage et qu’elle s’abstenait bien sûr de partager avec sa partenaire de crime du jour; fallait dire, que contrairement à ce qu’elle avait pensé au début, la chimiste pouvait se révéler utile. Avec beaucoup d’intérêt, elle s’était rapprochée de son hôte pour discuter de ça.

“ Mehh, tu sais comment les faire arriver à bon port ces fléchettes ? “ Une question plus pertinente lui venait d’ailleurs à l’esprit. “ On en trouve où, t'as une idée ? “ Un sourcil relevé, Ellone ne savait pas vraiment si elle devrait s’attendre à une réponse, aussi, elle décidait de passer à la suite. “ Bon allez assez perdu de temps, on y va. “

Sur cette bonne parole, elle ouvrait la marche avec tout de même une bonne nouvelle dans cette histoire, la fille savait où trouver son “boss”. Il n’était jamais très loin des putes qui vampirisaient son pognon. Elle confiait d’ailleurs l’info à Xenon entre deux gestes pour lui l’inciter à presser le pas un peu !