Double jeu, double mise ✘ Dai

Pluvieuse et nocturne. Comme d’habitude. Quasiment toutes les sorties de l’Oyabun se déroulent sous ces auspices et dieu sait qu’elles sont rares. D’habitude, Dragon n’est pas homme disposé pour qui le veut. Ses hommes sont la pour ça. Informateurs, assassins, trafiquants, tous connaissent leur rôle et savent ce qui les incombe. C’est d’ailleurs dû à cela que le Yakuza se déplace en cette soirée pluvieuse. Ses informateurs lui ont fait part d’une nouvelle tout à fait surprenante, du genre qu’on ne voit pas tous les jours. Et que l’on laisse encore moins passer, qu’il s’agisse d’une arnaque ou non. Si c’est le cas, son auteur le regrettera bien vite. Un membre de la triade, ses principaux concurrents, à la recherche d'informations… c’est bien téméraire.

L’audi noire dans laquelle il est mené au rendez-vous par son chauffeur fend la pluie sur son passage. Dans la voiture, tous sont armés. Si kabukicho est la zone la plus sûre à Decay, la prudence de Dragon ne s’arrête pas à son territoire. Et si les sabres ont un côté traditionnel qui plaît aux plus soucieux de leur style, ses hommes se contentent d’armes à feu. Plus rapide, plus efficace, peut-être moins yakuza mais le rejet des traditions est ce qui fait l’identité de son clan. L’efficacité avant tout. Les freins culturels ou éthiques ne sont pas faits pour lui ni pour aucun membre de son clan. C’est ce qui fait leur efficacité autant que la crainte qu’ils inspirent.

La voiture s’arrête. L’enseigne ou la rencontre a été convenue est un bar relativement prisé possédé par le clan Ikigami, dans lequel il a investi notamment pour la collecte d’informations. On confie bien plus facilement ses secrets sur l’oreiller ou après un verre de trop. De plus, tenir ce rendez-vous dans un endroit qui lui appartient lui permettra de contrôler l’entrevue à sa guise. En somme, d’être dans son élément. En posant pied à terre, alors qu’un de ses hommes s’approche pour lui tenir un parapluie, l’homme lève les yeux vers les néons de l’enseigne. “ The red strings club “. La nouveauté de la façade laissant supposer que l’établissement est neuf est une grosse partie des raisons de son succès. Il n’est certes pas au niveau du lucky 8, mais ce bâtiment attire trop l’attention. Dragon n’en a jamais été fan.

Gants en mains, masque sur le visage, l’Oyabun portait son accoutrement habituel. Et c’est bien ce qui lui valut d’être reconnu instantanément par les clients du bar, qui lui jetèrent des regards craintifs en coin. D’autres se courbaient sur son passage, tandis que l’homme avançait d’un pas lent et régulier. Il n’avait que faire de ce qui l’entourait. Ces endroits bondés ou l’alcool parlait autant que les drogues ne lui tenaient guère à coeur. Il n’en serait certainement pas le propriétaire si sa possession n’était pas aussi lucrative pour les affaires. Pour quelqu’un comme lui, gagner toujours plus le rapprochait toujours plus de son objectif final.

On le guida dans une pièce reculée, réservée aux V.I.P. ses gardes du corps se postèrent chacun à l’entrée, la pièce était de toute manière fermée et relativement petite. Un sofa l’entourait en carré, au milieu duquel était disposé une table. Les lumières, elles, étaient des néons roseâtres, parfois violents. Le genre d’ambiance type que l’on trouve dans ce genre de clubs. Mais l’Oyabun n’était pas ici pour consommer. Son contact devait bientôt arriver, et c’est tout ce qui lui importait. Son planning était suffisamment serré comme ça, pas le temps de tergiverser ou de perdre une seule seconde de son temps.

S’il pouvait d’ailleurs commander à boire, bien qu’il n’était pas la pour ça, Dragon préférait attendre. Si son client ne se pointait pas ou n’appréciait pas l’alcool choisit, ce ne serait que du gâchis pur et simple.