Une danse pour 1 $ [Pv Samuel Menna]

Comme souvent quand ces gars avaient bien bossé, Sam’ se faisait un devoir de les sortir pour s’amuser un peu. il leur laissait toujours le choix quant à la destination et les activités, puis se contenter d'aligner les billets  jusqu’au petit matin. Ça faisait partie de son job aussi après tout de motiver ses troupes, passer du temps avec. Bon il n’allait pas se plaindre non plus d’aller mater des jolies filles tout en buvant quelques verres, mais ce n’était clairement pas le genre d’activité qu’il ferait de lui-même. Il se voulait plus classe que ça ou alors  c’était le fait de se dire que ses filles devaient être les soeurs, les mères ou les enfants de quelqu’un qui le dérangeait. Il ne supporterait pas par exemple que sa soeur soit reluquée comme un morceau de viande. Enfin, au moins avec les danseuses, il y avait un côté artistique qui pouvait lui faire oublier un peu le côté frustrant qu’il ressentait face aux femmes qui vendaient leurs corps d’une façon ou d’une autre.

Il n’était pas question de les juger elles, mais plutôt leurs clients en fait… encore que même pas. L’argent facile qu’on disait. Sam’ ne voyait rien de facile que de se trémousser devant des chiens affamés près a débordé.  Pourtant il était, assis devant l’estrade avec ses gars à rire grassement à des blagues salaces, à enfiler verre sur verre sans se préoccuper de l’heure. Il ne faisait rien pour spécialement attirer la danseuse vers lui, pas tellement l’envie de lui glisser des billets pour suivre le moment et jusque là, il s’en était sorti plutôt bien. Enfin jusqu’à ce qu’elle apparaisse celle-là. Une nouvelle tête, il ne l’avait jamais vu, pourtant lui et sa bande par la force des choses étaient des habitués. Perplexe, ainsi, il l’observait évoluer sur la scène. Expert peut-être à force, il s’amusait de voir son regard se perdre dans le vide en arrivant. Il était curieux de savoir quel genre de mantra elle devait se répéter pour arriver à faire ça.

Finalement quelle n’avait pas été sa surprise en ne soupçonnant pas qu’elle était une débutante comme il le croyait. Fallait dire qu’elle les avait parfaitement trompés en attaquant fort dès les premières minutes. L'acolyte à sa droite en baver presque tout en lui glissant des billets dans la jarretière. Elle allait se faire un max de blé avec sa petite troupe, il n’avait aucun doute là-dessus en examinant la scène qui se jouait à côté. Toutefois ce côté très langoureux allait aussi très certainement vite lui attirer des ennuis et au bout de quelques minutes quand il constatait l'excitation un peu trop accrue à son goût de ses gars, il décidait de calmer le jeu en l’attirant vers lui en agitant une liasse de billets. Effet garanti, elle était là pour ça après tout non ?

Loin d’être aussi indélicat que son bras droit- le pervers, le rital se contentait quant à lui de lui tendre les billets afin qu’elle les attrape d’elle même tout en continuant sa danse. Ils étaient censés être là que pour le plaisir des yeux et ça lui convenait très bien ce qu’il voyait, autant les formes que l’expertise de cette femme pour se mouvoir.  Son regard se perdait un instant sur la paire de chaussures excessivement chère. Mais il n’était pas si étonné que cela qu’elle puisse se le permettre vu la prestation et la foule de gars qui s’entassait. Presque, il pourrait la plaindre, parce que bien qu’elle jouait le jeu, elle avait cette concentration presque intense. D’un mouvement de doigt, il lui faisait alors signe de se pencher vers lui pour pouvoir lui parler plus facilement dans ce bordel sans nom.

“ Tu fais des danses privées ? “

Les quelques gars à ses côtés se mettaient à siffler tout émoustillés. Il ne leur fallait pas grand-chose. Au-delà de la mater, parce qu’elle était agréable à regarder il ne fallait pas se mentir, c’était plus une excuse pour retrouver un peu de calme sans jouer le lâcheur qu’il désirait. Pour ça, les extras du salon privé étaient au top. Son astuce quand il saturait un peu de la soirée. Tout le monde était content comme ça.

Prévenir le barman ? C’était dans ses cordes. L’homme la regardait alors s’éloignait, reprendre son show. Une dernière fois il essayait de comprendre pourquoi il faisait ça. Un jour une bonne femme aurait sa peau, il était définitivement trop faible devant elles. Sans plus attendre et sur cette pensée, il s'exécutait, on lui demandait alors un acompte, on donnait quelques règles, puis enfin on l’escortait là où il devrait patienter. C’était plus calme, confortable aussi. Sa main fouillait alors rapidement ses poches pour récupérer de quoi fumer, dans son verre tout juste récupéré, des glaçons dansaient au rythme des vibrations de la musique ambiante. L’isolation n’était pas top, c’était sûrement volontaire pour assurer la sécurité des filles. Il pouvait parfaitement comprendre, d’un côté ça le rassurait aussi un peu.

“ Bonsoir Mademoiselle Chups. “ Lui glissait-il amusé devant ses manières trop polies pour le décor.

Tout en soufflant sa fumée, l’homme lui indiquait une bouteille récupérée au bar en passant, l’opercule était neuf et scellé, le brun avait l’habitude de la méfiance justifiée des filles d’ici.

“ Tu peux prendre cinq minutes pour souffler, le temps que je finisse ma clope, la fumée me gâcherait la vue tu comprends. Sers-toi si tu veux. “

Une excuse comme une autre, c’était physique mine de rien, puis il n’avait pas tellement envie qu’elle lui fasse un malaise et se la retrouver dans les bras à ne pas savoir quoi en faire. Non, c’était son côté paternel ça plutôt. Une gorgée de son whisky dévalait sa gorge et l’homme se demandait combien de temps il pouvait gagner comme ça dans la plénitude, encore que, tant qu’il la payait ? Un bout de tête d’un gorille venant espionner leurs activités lui laissaient penser qu’il vaudrait peut-être mieux-pour elle, qu’il la laisse danser. C’était son taf après tout… mais rien ne les empêchait de discuter si ?

“ Je t’ai jamais vu ici, pourtant je suis un habitué. Nouvelle ? “

L’explication la plus simple, mais aussi jolie et talentueuse qu’elle était, quelque part, cette fille faisait tache dans ce décor. Tout en continuant de tirer sur la fumée de son tabac, Sam’ l’observait curieux de ce qu’elle allait lui servir ou comment elle allait agir. Fallait dire que pour une “débutante” ça n’aurait rien de rassurant de se retrouver ici avec lui en tête à tête.  Qu’elle soit nouvelle ne voulait pas dire forcément novice en fait réalisait-il en soufflant son poison en petits cercles.

“ Comment t’as appris à bouger comme ça au juste ? “

Voilà qui serait son petit test pour si elle voulait ou non lui faire la conversation, il n’allait pas insister plus que ça si elle la sentait récalcitrante à parler. Il jouait plus le jeu qu’il n'appréciait réellement ce genre de détente.  Dans ce monde tout était souvent une question de paraître et de réputation. Ça ne le dépaysait pas en réalité de son ancienne vie de banquier...

Une indépendante ? L’information le surprenait pas mal, mais il n'avait pas l’intention d'insister sur ce point-là. Surement que le gérant voulait un peu de sang neuf, mais l’idée qu’une étrangère aussi sexy puisse avoir accès à ses gars et leurs bavardages en revanche le dérangeait pas mal. Il voulait bien croire que la fille ne faisait que danser pour gagner son blé, mais qu’est-ce qui ne lui disait pas qu’elle avait été envoyée de temps à autre pour récupérer des bruits de couloir, des fuites plus ou moins importantes sur les activités du quartier et de la famille. Sa déformation professionnelle sûrement, capot avant d’être l’homme, qui plus est, Sam’ était d’un naturel méfiant avec les femmes, il était persuadé que c’était l’une d’entres elles qui aurait sa peau.

“ Hum… Et comment les indépendantes trouvent du travail dans un endroit comme ici. Les autres filles sont ok avec ça ? “

Prenant conscience de son ton inquisiteur, l’homme reprenait une gorgée de son verre pour s’offrir un temps mort. Mais c’était plus fort que lui. Maintenant que le doute l’avait piqué, il devait s’assurer que la danseuse ne soit pas un danger pour leurs affaires.

“ J’ai tendance à me méfier des gens que je n’ai jamais vus. J’imagine que toi aussi. “ Il lâchait des billets sur la table, en cas de passage de surveillance, on ne lui prendrait pas la tête, enfin à elle. “ Du coup je me pose la question, tu fais souvent des danses privées ? “ Il tirait alors une clope d’un paquet dans sa veste, ça l’aidait toujours à mieux réfléchir. “ Parce que du coup je me dis, tu dois danser dans d’autres endroits aussi… D’autres quartiers ? “

La question avait le ton innocent, mais il n’en était rien, l’investigation était bien réelle. Il allumait son poison pour en tirer une bouffée accordant ainsi du répit à celle qui s’étirait et dont il ne se privait pas de mater, après tout, autant joindre l’utile à l’agréable, il avait des yeux pour voir. Cela allait devenir légitime que la fille se demande de quoi est-ce qu’il se mêlait celui-là au juste, mais si elle était habituée du milieu ou simplement maligne, elle comprendrait bien que ce n’était pas de la simple curiosité mal placée alors qu’il payait à la base pour s’amuser.

“ Ne va pas croire que je t’ai attiré ici dans un guet-apens ou un truc du genre. Juste qu’en repensant à cette histoire, y à quelques détails qui me chiffonnent pour mon quartier.” Et il avait bien choisi ses mots pour la mettre dans le bain. Peut-être qu’il fallait juste qu’elle le rassure vite fait bien fait pour qu’il lâche l’affaire.

il avait pris un petit instant pour l'observer, elle, son expression, ses réactions, mais aussi ses jolies courbes mises en valeur par le vêtement. Il était un homme avant tout...

“ Vous m’en direz tant. “

Elles n’étaient déjà pas copines entre elles en bossant au même endroit, alors avec une fille de l’extérieur de “passage” en plus. L’idée de l’ambiance dans les vestiaire lui décrochait un sourire amusé. il imaginait relativement ça plutôt bien, ressemblant à ce qu’il vivait quand sa soeur cohabitait avec lui et une de ses conquêtes ne lui revenant pas. En face des “ma chérie” et dès qu’il avait le dos tourné, tous les coups étaient permis entres elles. ainsi, savait-il à quel point une femme pouvait être une créature dangereuse… ce qui expliquait peut-être pourquoi il se méfiait toujours autant de ces dernières en imaginant le pire des scénarios à chaque fois.

“ En tout cas, vous parlez bien et raisonnablement ma chère. Les situations délicates, avec un pareil métier, ça ne doit rien avoir d’exceptionnel pas vrai ? “

Il avait préféré se dire que c’était de cela qu’il s’agissait et acquiescer ses dires avec bonne fois, elle ne semblait pas plus à l’aise que coupable au résultat de leur entrevue. Aussi, peut-être aurait-il pu pousser l’investigation ou même l'intimidation plus loin, mais rien ne justifiait pour le moment qu’il agisse ainsi. Alors simplement, il riait doucement à sa dernière remarque, ne pouvant qu’en apprécier la véracité. Il était le seul à investiguer ici, à juste titre, c’était un peu son rôle depuis qu’il avait rejoint Decay.  Puis aussi, il était un peu devenu paranoïaque, on allait pas se mentir. À force d’essuyer les tentatives de meurtres en même temps…

“ Je suis ravi de vous l’entendre dire. “

Concluait-il ainsi, puis comme pour mettre à l’épreuve ce qu’elle venait de lui dire, l’homme déposait une liasse de billet sur la table.

“ Dans ce cas, assez papoté. Montrez moi donc vos talents. “

Était il censé comprendre par ses dires qu’elle ne voulait pas converser et peut-être même en finir au plus vite avec  cette entrevue aussi étrange que son client ce soir. Ce qu’il pouvait comprendre aisément ceci dit. Lui même n’avait jamais été très à l’aise dans cette salle. Mais son monde était une histoire d’image avant tout. Il s'intéressait alors autant à la réaction que la demoiselle pourrait avoir, qu’au liquide ambré qui allait inondé sa gorge et apaiser son esprit cherchant les complications là où ils n’y avaient rien.  C’était plus fort que lui faut croire. Et tandis qu’il la sondait en s’affalant plus confortablement dans son fauteuil, le portrait devenait complet alors qu’il récupérait un cigare de son veston. Le tout était assez cliché effectivement, mais l’italien en avait fait sa marque de fabrique de ce côté-là.